Quatre ans après l’un des reboots les plus mémorables de cette génération, le Doom Slayer revient botter des culs sur PS4, Xbox One, PC et Stadia (et aussi bientôt sur Switch). Le très attendu Doom Eternal est enfin là, prêt à laisser des taches partout autour de lui…

27 ans, et toutes ses dents

Je fais partie de cette génération de joueurs qui a connu le tout premier Doom, sur PC en 1993 (puis sur SNES, etc). Souvent considéré comme le titre fondateur du FPS (ce serait oublier un peu vite Wolfenstein 3D ou Maze War, qui l’ont précédé), Doom s’est vite fait un nom. Par son gameplay nerveux, mais aussi par sa violence extrême (qui ferait sourire aujourd’hui). Tout le monde ne jurait plus que par lui, et il devenait même LA référence des « Doom Like » !

Et c’est là que je fais une énorme élipse, pour arriver à 2016. Date à laquelle le Doom Slayer (le mec casqué que vous contrôlez) faisait son grand retour sur nos machines de 8e génération. Reboot pour certains, tout nouveau jeu pour d’autres… Quoi qu’il en soit, avec ce « Doom 2016 » (c’est le petit nom qu’on lui a trouvé pour ne pas les confondre), Bethesda et idSoftware nous prouvaient par A+B que « l’ancêtre » avait encore son mot à dire… Qu’il avait encore des gueules à péter !

Quatre ans. Cela peut vous sembler court… Mais il s’en passe des choses en quatre ans. Un studio de développement, par exemple, apprend à mieux maîtriser une machine. À libérer tout son potentiel, avec parfois des moteurs maison mieux maîtrisés… Et c’est donc là que l’on attendait idSoftware au tournant. Après un Doom excellent en 2016… On rêvait d’un Doom Eternal encore mieux, encore plus fort… Et ça tombe bien, puisque c’est le moment de rendre notre verdict, puisque le jeu est disponible !

Votre mission : casser des bouches

Est-il nécessaire d’épiloguer sur le but du jeu Doom Eternal ? Vous contrôlez un super-soldat confronté à des hordes de démons, et devez tirer sur tout ce qui bouge à l’écran. Et si vous trouvez cela trop ennuyeux, vous pouvez finir vos ennemis en les démembrant, en les tronçonnant… Avec des finish qui n’ont rien à envier à un certain Mortal Kombat en termes de tripes et de gore.

Bon, rassurez-vous, on aura tout de même un minimum de scénario dans le jeu. Après ses péripéties sur Mars, le Doom Slayer est de retour sur Terre où l’Enfer s’est déchaîné à cause de fanatiques qui ont eu la bonne idée de permettre aux démons d’envahir notre belle planète. La réduisant à l’état de ruines et de flammes. L’enfer sur Terre, quoi ! Et pour chasser tout ce petit monde, qui c’est qu’on appelle ? Ghostb… Doom Slayer ! Oui, si vous avez joué à Doom II en 1994, ça va vous rappeler des choses 😉

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En d’autres termes, Doom Eternal, c’est un peu un plaisir coupable. Ce film d’action des années 90, avec Schwarzy ou Stallone, seuls face à des millions d’ennemis, et sauvant le monde en solo… Ces films qui vous demandent de poser votre cerveau à coté de vous, mais vous détendent avec son scénario nanardesque, que l’on apprécie pourtant. Bref, ça ne fera pas de vous un génie, mais vous allez passer un bon moment. Et c’est justement cette ambiance qui se dégage de Doom Eternal. Pas vraiment un traité de philosophie, mais on aime se défouler, armes en main.

Avantage : s’il est peu complexe, le scénario est plutôt bien ficelé. Et si vous ne connaissez pas la licence, vous ne serez pas largué. Le jeu peut donc être abordé sans avoir parcouru les autres épisodes.

Gameplay : un énorme défouloir

Concernant le gameplay de Doom Eternal, inutile de vous faire un dessin : ennemi… Cibler… Tirer ! Un FPS, quoi ! OK, j’avoue que cette approche est assez caricaturale, d’autant que le jeu vous propose beaucoup plus qu’une simple touche de tir. Car, plus précisément, nous sommes dans un fast-FPS. Comprenez par là que vous n’y trouverez pas des déplacements réalistes à la Call of Duty, mais plutôt des mécaniques plus « arcade » comme un double saut, la possibilité de s’agripper à des parois, ou un bullet-time vous permettant de cibler les points faibles des adversaires… Voire plus tard de dasher dans les airs pour atteindre des zones inaccessibles. Oui, ça fait quelques commandes à digérer !

Très vite, on assimile toutes ces mécaniques pour les enchaîner sans trop réfléchir, avec beaucoup de facilité. Et ça tombe bien, car les ennemis vous tombent dessus sans vous laisser le temps de consulter les commandes du jeu. Il faut réagir vite et bien face à des démons qui surgissent tantôt en groupe devant vous, soit vous attaquent par derrière sans prévenir.

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Et c’est là LA particularité de ce Doom Eternal. Tout va vite, très vite. Le gameplay, particulièrement nerveux et brutal, est cohérent avec le rythme frénétique du jeu. Il vous oblige à bouger vite, tout le temps. À vous retourner pour assurer vos arrières, à ne jamais rester en place sous peine de finir cloué au sol, votre barre de vie réduite à néant. Car nous ne sommes pas ici face aux zombies de The Walking Dead : ici, les ennemis sont vivaces, arrivent même parfois à anticiper vos mouvements… Le rythme est soutenu, et il n’est pas rare de terminer un niveau avec le sentiment d’avoir tout (ou beaucoup) donné physiquement.

Ce qui peut sembler paradoxal, car si ce rythme effréné vous invite à foncer dans le tas et à solutionner vos problèmes par un carnage… Doom Eternal est un jeu qui vous demande… De la jugeote ! Vous ne l’aviez pas vue venir celle là ! Pourtant, c’est une réalité ! La clé du succès est de repérer les ennemis les plus dangereux pour adopter la bonne approche (certains demandent de trouver leur point faible)… Tout en gardant un œil sur vos munitions, qui sont limitées. Car je peux vous assurer que ça la fout mal d’arriver face à plusieurs Revenants avec seulement sa b… et son couteau… Et un flingue vide !

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Pour looter, outre les munitions qui apparaissent au sol, pensez à soigner vos « finish » ! Le fameux GloryKill (quand l’ennemi vacille et clignote) vous offrent de la vie, et cramer vos adversaires avec le lance-flammes dorsal vous permet de récupérer du shield. Et la tronçonneuse ? Ses finish vous permettent de récupérer des munitions, et croyez-moi, ça va être très utile !

Heureusement, au fil du jeu, vous aurez quelques runes à collecter pour améliorer notre cher Slayer. Ainsi affublé de statistiques plus consistantes ou de nouveaux pouvoirs, il aura tout du sauveur. Et histoire de faire durer le plaisir, les niveaux peuvent être retraversés une fois terminés, avec des défis en Arène, ou des versions alternatives plus difficiles. La Forteresse (un hub) va s’agrémenter au fil du temps… Des défis journaliers vous sont aussi proposés. En termes de contenu, il y a de quoi faire !

Réalisation : vraiment joli à regarder

On peut être bourrin, et particulièrement gore, sans pour autant oublier de soigner sa réalisation et sa mise en scène. Et de ce point de vue, Doom Eternal fait largement le job. C’est beau, les cinématiques sont vraiment chouettes à regarder. Les décors sont eux aussi majoritairement superbes, que vous traversiez un champs de lave infernal, ou une cathédrale chouettement modélisée… Le joueur est littéralement hypnotisé par le 60 fps constant.

Le jeu est aussi réussi visuellement ingame, mais je pense qu’il est inutile de vous rappeler que vous ne partagerez sans doute pas cet avis si vous vous évanouissez à la simple vue d’une goutte de sang. Car oui, Doom Eternal reste un jeu gore, et sur ce point, il n’usurpe pas son PEGI 18. Des démembrements à la tronçonneuse, des faces explosées, de la chirurgie faciale à grands coups de fusil… Doom Eternal se situe entre la médecine légale et le rayon boucherie. Vous allez verser, dans le jeu, l’équivalent de la mer Égée en hémoglobine !

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La réalisation d’un jeu, c’est aussi sa musique. Et sur ce point, c’est aussi du tout-bon, avec une superbe OST signée Mike Gordon (avec un chœur composé de grands noms du metal). Une bande-son qui va vous agresser les tympans si vous êtes allergique au heavy-metal. Mais dans le cas contraire, l’excellente musique contribue à nous plonger dans cette frénésie démoniaque. Elle colle parfaitement à l’ambiance survoltée du titre, et va accentuer votre envie de défourailler tout ce qui bouge à l’écran.

Du bon level-design ?

S’il est un point qui m’a également particulièrement séduit dans ce Doom Eternal, c’est son level-design particulièrement réussi. L’architecture des niveaux joue à la fois sur l’horizontalité (avec un début et une fin), mais on appréciera encore davantage sa verticalité, vraiment géniale. Et certains passages vont vous donner le vertige.

Les niveaux ont été conçus pour vous offrir également quelques phases d’exploration. Oui, je sais, c’est assez inattendu, pourtant ceux qui connaissent Doom ne seront pas surpris. Je m’explique. Parfois, pour atteindre la fin d’un niveau, ou pour progresser dans une nouvelle zone, vous devrez trouver un item important. Et là, oubliez la sensation de linéarité ! Vous allez devoir mettre les mains dans le cambouis, et partir fouiller le niveau. De même, vous devrez trouver des clés pour découvrir les six Slayer-Gates (des arènes plus difficiles, avec des hordes de démons)… Et vous coltiner des zones que vous estimiez dangereuses pour aller trouver cette pu… De clé !

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Mais au final, on apprécie ces phases d’exploration, qui nous permettent d’explorer chaque niveau encore plus en profondeur. De réaliser que les développeurs ont vraiment potassé leur level-design. Que Doom Eternal n’est pas un jeu à couloirs, mais qu’il est beaucoup plus riche que cela.

Mais il y a un revers à la médaille ! Car si elles sont plutôt pas mal foutues, les phases de plate-forme ne nuisent-elles pas justement au rythme frénétique du jeu et à sa progression basée justement sur sa rapidité d’action ? Là, les avis seront partagés. Pour ma part, j’avoue que cette diversité est appréciable, et permet d’aborder le jeu sous un angle différent. Mais pour un fan pur et dur de la licence, qui s’attend à rusher les niveaux en allant à l’essentiel (tabasser et avancer le plus vite possible), alors oui, les parties d’escalade vont hachurer le rythme du jeu, indéniablement.

Un online plus contestable

Avec autant d’indicateurs au vert, je me suis demandé si Bethesda ne nous avait pas sorti ici le Doom ultime ! Et n’étant pas un grand fan de FPS, je peux vous assurer qu’il faut sortir du lourd pour me mettre une telle claque ! Pourtant, c’est en allant dans le menu online que j’ai pu commencer à relever quelques défauts.

Je ne suis pas un grand expert de FPS online (hormis pour Overwatch que je continue à poncer), mais il me semble que le online de Doom Eternal est un peu léger. Par exemple, je pense que beaucoup de fans seront surpris, voire déçus, de ne pas pouvoir y faire de Deathmatch ou de King of the Hill. Le mode online du jeu fait le job, mais en assurant le minimum syndical et en se focalisant sur la traque. Le Battlemode (un jeu asymétrique en 2vs1) joue cette carte en vous permettant d’incarner soit le Doom Slayer, soit deux démons (parmi l’Arch-Vile, le Mancubus, le Maraudeur, le Doloris, ou le Revenant). Rien de plus pour le moment (sous réserve de prochaines mises à jour). C’est satisfaisant, mais pas non plus mémorable, à une époque où un jeu ne peut plus se passer d’un solide online. Et sur ce point, j’avoue que le studio aurait pu faire mieux, à plus forte raison pour un titre qui se prétend un pilier du FPS.

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Et puisque l’on parle des reproches, c’est l’occasion d’aborder ce qui constitue pour moi l’un des défauts principaux du jeu. Un point déjà abordé dans la partie consacrée au gameplay : la gestion des munitions. En tant que fast-FPS, Doom est (et doit être) un jeu où l’on avance, on bourrine, sans se préoccuper de ses chargeurs. Ici, vous garderez les yeux rivés sur votre arme, en stress lorsque vous devrez charger un groupe d’ennemis avec seulement deux balles. Certes, en cas de pénurie, il vous reste votre tronçonneuse, mais elle doit elle même être régulièrement rechargée en essence. Ne vous reste plus qu’un coup de poing dont les dégâts sont plus que contestables. Cela peut nuire à l’expérience, le défouloir se changeant alors en un jeu où votre objectif principal sera de guetter le moindre loot laissé au sol…

Tant que j’y suis, j’ajouterai qu’il est regrettable de ne pas pouvoir sauvegarder manuellement… Et que le créateur de niveaux (Snapmap dans Doom 2016) ait disparu. À moins que je ne sois passé à coté…

Au final

Doom Eternal ne sera pas nominé pour le prix du meilleur scénario de 2020. En revanche, pour ce qui est de vous défouler dans des gerbes de sang, il remplit le contrat . Encore plus beau, plus pêchu… Il transforme l’essai marqué en 2016 ! Et confirme que Doom, malgré son grand âge, reste un acteur incontournable de la scène FPS.

Pourtant, un fan-hardcore trouvera sans doute à y redire, notamment à cause des nouveautés de gameplay apportées par cet opus. Une verticalité qui peut nuire à votre expérience si vous aimez jouer en mode bûcheron, une gestion des munitions qui va vous stresser plus qu’autre chose… Doom Eternal est certes plus beau, mais moins « arcade » que son aîné de 2016, qui était plus réussi sur l’aspect « défouloir » ! On va dire qu’il est plus… Technique.

Il n’empêche que, globalement, le jeu est bon ! Ne se prenant pas au sérieux un seul instant, il constitue le bon gros défouloir attendu. En plein confinement, il va vous offrir un bon moment, à passer vos nerfs devant votre écran.


Doom Eternal

Testé sur une version PS4 fournie par l’éditeur
Points positifs :
  • Des combats ultra-nerveux
  • C’est beau, et fluide, plutôt bien optimisé
  • Le coté « nanar d’action » des années 90 vraiment génial
  • La direction artistique réussie
  • Le level-design et la verticalité
  • De chouettes combats de boss
  • Certains pouvoirs pétés
  • Durée de vie correcte (plus d’une vingtaine d’heures pour tout collecter)
Points négatifs :
  • Un online un peu léger
  • Le développement des armes parfois complexe
  • Un scénario anecdotique
  • Pas de sauvegarde manuelle
  • Plus d’éditeur de niveaux
  • Il faut compter ses munitions