TEST. – Véritable dinosaure du jeu vidéo, pour ne pas dire un fondateur du genre FPS, « papy » Doom revient ce mois-ci sur PC, Xbox One et PS4, après une grosse cure de jouvence. Botox et crème antirides en injection cutanée, la licence a t-elle encore sa place sur la scène vidéoludique ? La réponse avec ce test !
Revenu de l’enfer des années 90
Souvenez-vous ! Nous sommes au début des années 90. A cette époque, on joue à The Legend of Zelda : A Link to the Past ou Super Mario World sur Super Nintendo, à Sonic 2 sur Megadrive… Généralement, c’est coloré et tout mignon. Les gamers ne savent pas encore qu’ils vont bientôt découvrir un nouveau genre : le FPS !
Car dans un studio nommé id Software, de grands malades (dans le bon sens du terme) bossent sur une idée complètement folle pour l’époque : un jeu de tir à la première personne, dans un environnement en 3D. Totalement futuriste pour l’époque !
Et le 10 décembre 1993, les joueurs PC découvrent Doom, un jeu de tir qui vous propose de dégommer du démon, dans un environnement typé SF. La grosse révolution est donc l’apparition de la 3D, qui offre aux joueurs de nouvelles perspectives.
La licence connait son petit succès auprès des joueurs, et devient une référence (pendant longtemps, on parlera des FPS comme des « Doom-Like« ). Le jeu sera adapté sur la plupart des supports, et connaîtra plusieurs suites.
Je vois déjà certains d’entre-vous, râler en lisant ces lignes, se disant que ce n’est pas Doom qui a inventé le FPS en 3D, mais Wolfenstein. Et ils ont raison, c’est juste ! Il n’empêche que Wolfenstein loupera son heure de gloire, Doom gagnant d’entrée une popularité sans commune mesure : développé en shareware, il sera partagé des millions de fois (10 millions si ma mémoire est bonne)…
Après un Doom 3 très axé « survival-horror » (PC et X360) et une version PC en demi-teinte, le jeu refaisait parler de lui l’an passé en annonçant son arrivée sur « current-gen ». Et cette année 2016, c’est donc un reboot qu’id Software et Bethesda offrent à leur cultissime Doom : on ne change pas le principe, mais on se sert de la technologie actuelle pour proposer un jeu encore plus immersif, avec des graphismes en adéquation avec la technologie du moment…
Un jeu qui pèse lourd ?
Pour moi, le cauchemar commence dès l’installation du jeu : il faut dire qu’avec un pauvre disque dur de 500 GO, ma PS4 a bien du mal à digérer les grosses productions actuelles, qui pèsent quelques dizaines de gigas, m’obligeant régulièrement à désinstaller des jeux que j’aimerais pourtant garder.
Et sur ce point, Doom est plutôt « généreux » ! 47 GO rien que pour le jeu… Et comme si cela ne suffisait pas, l’installation du titre s’accompagne d’une première mise à jour, qui vient rajouter 5,7 GO sur le disque ! Allez hop, 53GO d’occupés…
Avec un tel bagage déposé à la réception de l’hôtel, je me dis que le jeu va tourner comme une horloge ! C’est plus ou moins vrai : car si le titre est magnifique, et s’il offre une fluidité bien plaisante, que dire des temps de chargement ? Ces ∉ϒ⊗ΦΩ de temps de chargement, entre chaque niveau, ou avant de lancer une partie ! C’est simple : si j’avais lancé le jeu en commençant ce chapitre, j’en serais à peu près à 70%… OK, j’exagère, quoique…
Dur dur, le réveil !
Dans la campagne solo, on aurait aimé se réveiller dans un bon plumard, après avoir joyeusement gambadé en rêve au pays des licornes. Mais il n’en est rien, et c’est un réveil plutôt glauque pour votre Marine !
Allongé (et attaché) sur une table de labo, notre héros reprend ses esprits au beau milieu de ce qui semble avoir été un joyeux massacre. Pour parfaire le cadre, quelques bougies sont disposées ici et là, dès fois que vous aimeriez prendre votre petit dej’ assis dans un pentagramme, en compagnie de Satan.
Mais déjà, des démons s’approchent, comme alléchés par la bonne odeur de la chair fraîche. Il ne vous reste plus qu’à vous libérer de vos entraves, pour saisir un gun qui passait par là, et leur offrir de jolis piercings au milieu du front !
Une fois le ménage fait, comme les programmeurs du jeu n’ont pas vraiment prévu de vous laisser vous balader à poil, dépêchez-vous de trouver une armure ! Ainsi vêtu façon « Master Chief », il y a encore beauuuuucoup de monstres à zigouiller dans la joie et dans la bonne humeur, afin de découvrir ce qui s’est passé sur cette pu… de planète !
On ne va pas vous le cacher : la campagne solo de Doom est longue, et difficile aussi, au point de rebuter certains joueurs. La raison ? Id Software a voulu rendre hommage au jeu originel, et l’éditeur va jusqu’au bout des références, à commencer par la gestion de votre santé : ici, on ne regagne pas de la vie automatiquement en se planquant dix secondes dans un coin ; on reproche souvent aux « Call-of-Field » de manquer de réalisme sur ce point, et Doom réintègre un système auquel il nous a habitués depuis le début : les items de santé à récupérer. Plus difficile, mais plus crédible et beaucoup plus intéressant !
Sur le principe, pas vraiment de gros changements, et le titre est un enchaînement de salles dans lesquelles vous attendent des monstres avides de chair humaine. Les salles défilent, on tire, on explose… Défoulant, mais vite redondant au bout de quelques heures de jeu ! Vous pourrez également customiser votre armure en ramassant des jetons Praetor sur les cadavres des soldats, ou vos armes grâce aux drones de terrain et aux points d’expérience.
Du coté du scénario, tout tient sur un timbre-poste ! Le héros se réveille dans une base martienne, et visiblement, monstres et démons ont pris le contrôle de la planète. Vous reprenez donc vos esprits au milieu d’un carnage, et votre but sera désormais de vous lancer dans une énorme purge. Certes, vous découvrirez quelques rebondissements, mais l’essentiel est dans ces quelques lignes ! Simpliste, voire prévisible dans la seconde moitié… mais… on s’en cogne totalement ! Soyons honnêtes : nous sommes là pour nous défouler, pas pour pondre une thèse, donc…
Multi mon amour !
Il aurait pu venir compléter le solo, mais ce mode s’impose comme une entité à part entière sur le disque, pour ne pas dire « un jeu dans le jeu » : je parle évidemment du mode multijoueur.
Je vous invite d’ailleurs à aller voir notre vidéo, réalisée lors de la beta de Doom, sur notre chaîne YouTube (et abonnez-vous au passage, cela fera couler des larmes de joie sur nos petites joues).
Contrairement à ce que nous avions pu constater dans la beta, la connexion est ici plus fiable et plus stable.
Assez classique dans l’ensemble, le mode multi vous propose des affrontements à 6 contre 6, en reprenant l’intégralité de l’arsenal du mode solo. Cerise sur le gâteau, vous pourrez aussi y incarner un démon en ramassant une rune pendant votre partie : si plusieurs créatures sont à débloquer, le « Revenant » fait office de créature de base. Vous allez vous rendre vite compte que le fait d’avoir un démon dans son équipe (personnage beaucoup plus fort que le Marine de base) conditionne la victoire !
S’il n’est pas ultra-révolutionnaire, le mode multijoueur fait son job, apportant ici et là du classique, mais aussi de bonnes trouvailles (comme le « match à mort » ou le mode « sentier de la guerre » et sa zone en mouvement). Au total, neuf maps différentes s’offrent à vous, avec la possibilité d’en rajouter de nouvelles si vous êtes prêts à faire chauffer la carte bleue : trois nouvelles cartes seront disponibles en DLC, à raison de 40€ le season pass, ou 15€ la carte seule… Oui, ça fait un peu cher, j’avoue !
Snapmap : Just do it !
Intéressons-nous maintenant à un mode vraiment très intéressant : le snapmap ! Lui aussi hérité d’une douce époque où Doom était déjà « moddable », il est tout simplement un incontournable, qui ne pouvait pas être absent de ce nouveau jeu.
Pour faire court, le snapmap est en quelque sorte un éditeur de niveau, plébiscité par les fans de la première heure. Mais vraiment pour faire court, car il est bien plus que cela !
Le snapmap vous permet véritablement de créer en profondeur, en simplifiant à l’extrême les différents outils de programmation. les différents paramètres, et tout vous est désormais possible, ou presque. Car il ne faut pas déconner : vous ne pourrez construire qu’avec des éléments du jeu (tant pis si vous comptiez reproduire avec fidélité le salon de mémé). Mais ce menu vous offre tant de possibilités que vous allez vite vous prendre pour un programmeur de chez ID…
Encore mieux : ce mode vous permet même de corriger les défauts relevés dans le jeu, en moddant tout ce qu’il est possible… Vous déploriez le fait que le jeu semble moins rapide que la version d’origine ? Ici, vous pouvez changer la donne !
Véritable outil incontournable pour tout fan qui se respecte, à plus forte raison s’il aime laisser parler sa créativité, l’éditeur nous livre ici un mode fort agréable et vraiment simple à prendre en main !
L’héritage du « premier Doom »
C’est ainsi que le titre d‘id Software nous a été vendu. Et force est de constater que le contrat a été honoré. Pour les joueurs qui, comme moi, ont connu le premier volet, tout y est ! A l’exception des graphismes, forcément beaucoup plus élaborés, ce Doom est une copie conforme de son aîné.
Cette violence, qui avait fait du premier jeu la tête de turc préférée des associations dénonçant la violence dans les jeux vidéo, est toujours de la partie. On met son cerveau sur « off » et on tire, mais pas que : on éclate des crânes à mains nues, on arrache des membres, on relooke ses ennemis à la tronçonneuse… C’est avec un certain sadisme que l’on massacre du démon, avec un plaisir presque gênant, tout en repeignant la pièce avec des tripes et de l’hémoglobine. Le jeu mérite bien son Pegi 18+ !
La construction du jeu, elle même, s’articule autour des trois ingrédients qui ont fait le succès de la franchise, un triptyque composé d’un long solo, d’un multi complet, et de la possibilité de créer et partager ses propres niveaux. On ne change pas une formule qui gagne !
La reprise la plus flagrante du premier volet reste la gestion de la santé : tandis que les FPS actuels ont institué une norme totalement illogique, qui consiste à vous offrir une vie qui se régénère automatiquement au bout d’un moment, Doom campe sur ses positions. Ici, la vie, ça se mérite. Pas de barre qui remonte, pour vous soigner, il faudra trouver les items dans les niveaux.
Cyberdémons, Mancubus, HellKnights, Cacodémons… Les fans de la première heure se réjouiront également de retrouver le bestiaire culte de la franchise, ou les niveaux construits tels des labyrinthes. Seule absence au tableau : la tronche de votre héros, dans un coin de l’écran, qui pisse le sang lorsqu’il est mal en point. Un détail certes, mais un détail culte ! A moins qu’un bonus ne vienne nous offrir cette option…
Ce Doom est le digne héritier de son aîné. Il fait passer les FPS contemporains pour de gentilles balades au pays des Merveilles. Il nous rappelle surtout les sensations des premiers shooters : à l’époque, on ne cherchait pas encore le headshot, ou à sniper l’adversaire en finesse, en campant dans un coin du décor ! Doom nous fait revivre l’époque des coups de pompes dans la gueule, des bourre-pifs explosifs, du jeu bien bourrin et viscéral ! Mais on n’est pas vraiment là pour échanger des politesses avec l’adversaire ! Beaucoup moins technique que les ténors du moment, Doom reste néanmoins un jeu qui procure du fun, de l’amusement dès les premiers tirs, ça non plus ça n’a pas changé !
Différent des autres FPS !?
Vous l’aurez compris, Doom n’a strictement rien à voir avec les autres FPS ! A commencer par son coté « gros défouloir coupable » qui, quand on y réfléchit, constitue l’ADN même de la licence. On pète du démon à tours de bras, et on aime ça. Les bruitages renforcent encore plus cette impression de bosser dans un rayon boucherie, et je ne parle même pas des graphismes qui vont vous faire vomir si vous ne supportez pas la vue du sang.
Volontairement provocateur et transgressif, Doom est un appel assumé à la violence, qui réveille la bête qui est en vous. Même le plus trouillard des joueurs sera animé par l’envie de broyer de l’intestin grêle de démon ! J’en veux pour preuve ce gameplay qui vous pousse à aller déclencher de la « Fatality » (comme on dit dans un autre jeu vidéo), à provoquer des finish gores, au corps à corps.
Je parle évidemment du finish que vous déclenchez lorsque vous avez suffisamment plombé un démon, qui se met alors à briller en rouge. Le moment idéal pour le finir à mains nues, plongeant vos poings dans sa cage thoracique, ou lui broyant le crâne sans préavis. Oui, c’est crade, mais cette élimination rapprochée vous permettra de récupérer des orbes de vies et des munitions… Le jeu vous pousse clairement à privilégier une stratégie offensive.
La construction labyrinthique (parfois un peu trop, d’ailleurs) des niveaux apporte, elle aussi une nouveauté pour la licence : Doom découvre la verticalité ! Le titre jouait autrefois davantage la carte de l’horizontalité. Sans atteindre le niveau de verticalité d’un Black Ops III, les level-designers nous proposent ici des arènes sur deux, voire trois étages. Pour un joueur qui ne connaît pas Doom, cela n’a rien d’original, mais je puis vous assurer que c’est un plus, qui offre de nouvelles mécaniques (comme le fait de pouvoir tuer un ennemi en lui tombant dessus).
Dans la campagne solo, en revanche, on se perd vite, on tourne parfois en rond tant certains niveaux sont longs et tortueux, et comme ici, la santé vous est comptée, vous allez vite apprendre à craindre la mort qui vous attend au tournant, parfois à quelques mètres d’une trousse de premiers soins ^^
Au final
Doom est un très bon FPS, on ne va pas dire le contraire ! Cependant, il a la malchance de sortir au mauvais moment, quasiment en même temps qu’un autre FPS qui jouit d’une énorme et solide communauté de fans : Overwatch !
Mais n’allons pas trop vite : certes nous avons deux FPS, mais avec des univers bien distincts. Doom séduira donc sans aucun problème les nostalgiques, ou les amateurs de gore, qui recherchent un jeu avec un PEGI élevé et une difficulté plus corsée. Voici le jeu parfait pour se défouler après une longue et pénible journée : il suffit de déconnecter ses neurones, et de se laisser aller à ses instincts les plus primaires.
Au final, Doom nous a littéralement scotchés ! Le jeu est magnifique, fluide, et propose suffisamment de contenu pour vous souder la manette au poignet pendant un bon moment. Il embarque un solide contenu, et propose un niveau de difficulté qui va en faire pâlir plus d’un.
Si vous aimez le bon gros FPS qui tache, ce serait criminel de louper cette nouvelle version. Certes, les nouveautés sont loin de révolutionner la licence, et le scénario ne restera pas dans les annales. Mais le reboot est réussi, et relève à lui tout seul la réputation d’une licence hélas entâchée, il y a quelques années, par un affreux nanard au cinéma.
Id Software offre une nouvelle cible aux « anti-jeux vidéo parce que trop violents ». Mais avec l’irrévérence qu’on lui connaît, Doom leur tend gentiment le majeur, sur un fond de musique métal.
Verdict
Assez classique sur le fond, mais jouissif sur la forme, le légendaire Doom revient aux affaires !
14/20
Les + :
- Bonne fluidité
- Graphismes très fins
- Pas mal de modes en multi (8 modes)
- Tous les ingrédients de Doom sont là
- Bien nerveux, brutal pour ne pas dire bien gore : un gros défouloir !
- Le « snapmap », tout simplement génial !
- La bande-son « métal »
Les – :
- Temps de chargement !!
- Le solo devient vite répétitif, à mi-parcours
- Le scénario pas toujours bien inspiré
- Un multi moins nerveux que le mode solo
- Des DLC un peu trop chers (40€ le season-pass, ou 15€ la carte seule)
Doom, par id Software pour Bethesda, sur Xbox One, PS4 et PC. Pegi : 18 (tout rouge flamboyant).
Test réalisé sur une version fournie par l’éditeur.
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