Si les jeux édités par Spotlight by Quantic Dream, le label indépendant du studio créé par David Cage, ne nous ont jamais déçus jusqu’à présent, il faut bien avouer que le dernier en date, Dustborn, a piqué notre curiosité. Jeu d’action/aventure avec une (très) grosse dose narrative, il intrigue aussi par sa direction artistique très colorée et qui semble tout droit sortie d’un Comics. Si le jeu sort le 20 août sur consoles et PC, on peut enfin vous donner notre avis. Et voici donc notre test !
Derrière le jeu, un nom qui est un gage de qualité
En tant que testeur de jeux vidéo, c’est une sensation que j’apprécie particulièrement ! Celle de découvrir un jeu dont j’ai vaguement entendu parler, mais pas plus que ça. Un titre au demeurant fort sympathique, mais que je n’aurais pas forcément noté dans mes priorités du moment. Et puis, une fois lancé, il se passe un truc. Le feeling passe. Et il devient vite impossible de lâcher la manette. Pire encore, une fois la console éteinte, l’histoire vous obsède, et il vous tarde d’y replonger pour découvrir la suite. Et puisque c’est justement ce qui vient de se passer avec ce Dustborn, il va falloir qu’on en parle !
Tout d’abord, vous devez savoir que le jeu est développé par le studio norvégien Red Thread Games. Un studio que vous connaissez peut-être déjà si vous attendez le polar post-apocalyptique Svalbard (dont la date de sortie est encore inconnue). Ou si vous avez joué au jeu d’aventure/mystères à la première personne Draugen (2019). Ou encore au beaucoup plus connu jeu d’aventure Dreamfall Chapters (2014). Bref, un jeune studio, puisqu’il a été créé en 2012, mais qui commence néanmoins à avoir un solide bagage. En juin 2020, Red Thread Games annonçait un nouveau jeu narratif pour 2021, puis… Silence radio, jusqu’à ce que ce Dustborn ne revienne dans nos fils de news, avec un nouvel éditeur.
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Dustborn est édité par un studio français, puisque l’on doit sa publication à Quantic Dream. Le studio qui nous a régalés avec Fahreinheit, Heavy Rain, Beyond Two Souls ou Detroit : Become Human, pour ne citer que ces hits ! Plus exactement, Dustborn est édité par Spotlight by Quantic Dream, un label créé en 2019 et qui permet au géant français de publier des jeux indépendants. On lui doit notamment Under the Waves, Lysfanga, ou encore Sea of Solitude. Et donc une superbe opportunité pour Red Thread Games : malgré un report de trois ans, le jeu nous parvient aujourd’hui, plus solide !
Vous l’aurez compris : quand l’éditeur nous a proposé de découvrir sa nouvelle production, on y est allé les yeux fermés. Conscients que, si on n’est jamais à l’abri d’un accident industriel, il y a quand même peu de chances d’être déçus… Alors c’est parti pour le test d’un jeu qui pèse à peine 12 GO sur le disque de votre PS5/Series X/S. Et qui, autre argument choc, est affiché à 29,99€ sur votre store favori. Quand beaucoup de jeux moins qualitatifs frôlent les 80 balles !
Bienvenue dans le futur !
Dustborn nous plonge dans un futur dystopique, puisque nous sommes ici aux USA en 2030. On peut même parler ici d’uchronie, puisque dans la réalité du jeu, JFK n’a pas été assassiné en 1963 : c’est sa femme Jackie qui a pris la balle à sa place. Et le Président a ensuite épousé Marilyn Monroe. Quelques décennies plus tard, les USA sont gouvernés par un régime totalitaire (coucou Donald ?). On y découvre une joyeuse bande dans ce qui semble être un road-movie entre potes. Si ce n’est que, quelques lignes de dialogue plus tard, on apprend que Pax, Sai, Noam et Théo sont en cavale. Ils ont dérobé un mystérieux colis, qu’ils doivent emmener à travers la République Américaine, pour le livrer sans se faire capturer par la Justice (la milice locale au service des Puritains).
Comme si cela ne suffisait pas, nos quatre compères sont aussi traqués car certains sont des Déviants, appelés ici Anomes. Des mutants détenteurs de super-pouvoirs, liés aux mots et à la voix. Ce qui va d’ailleurs devenir un prétexte pour introduire une mécanique de gameplay essentielle, mais on va y revenir plus bas. Donc, comme vous pouvez vous en douter, tout Anome est considéré comme hors-la-loi, donc traqué par les forces de l’ordre.
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C’est à Pacifica (équivalent de la Californie) que nos quatre compères s’emparent du fameux « colis » qu’ils doivent livrer en Nouvelle Écosse (ou Nova Scotia en VO, Nord-Est des USA/Canada). Et donc, ils vont devoir traverser la République Américaine (ainsi appelée depuis un incident au début des années 2000), en territoire hostile. Afin de passer inaperçus, ils se procurent un bus, et se font passer pour un groupe de punk-rock, Dustborn, en tournée dans tout le pays… C’est ainsi que débute ce road-trip (c’est aussi ce que vous avez pu apprendre des trailers), et on ne vous en dira pas plus du scénario. Si ce n’est que, road-movie oblige, nous allons voir beaucoup de pays et rencontrer d’autres personnages, plus ou moins importants pour une intrigue bien ficelée et passionnante.
Le jeu a une âme et un univers bien à lui, avec une ambiance très typée Comics. D’ailleurs, c’est aussi un point fort du jeu : ce climat ambiant est renforcé par une direction artistique qui emprunte énormément de codes à la BD. Du cell-shading, beaucoup de couleurs, un chapitrage, des planches et des bulles, des cases blanches pour les dialogues et des cases jaunes qui contextualisent… Dustborn construit son univers comme une bande-dessinée, et franchement, on adore !
Un gameplay plein de fraîcheur
Voilà sans doute l’aspect le plus compliqué à relater : de quel type de jeu s’agit-il précisément ? C’est un défi que de vous l’expliquer précisément. Car si l’éditeur nous l’a présenté comme un jeu narratif, et si sur vos stores, vous trouverez Dustborn dans la catégorie action/aventure… En réalité, ce titre à la troisième personne mêle de nombreuses boucles de gameplay différentes, ainsi que des mini-jeux. Et bien que l’on retrouve les mêmes boucles à la longue, cette variété nous assure un jeu sans vraiment de monotonie.
L’aspect narratif, vous allez bien le sentir ! Le jeu est en effet bavard, très bavard ! Et ce du début à la fin. Si vous êtes allergique aux dialogues sans fin, vous allez être servis. En même temps, comment le lui reprocher ? Dustborn a énormément de choses à nous raconter. Son univers est plein de mystères qui ne demandent qu’à être expliqués. Chaque étape de ce road-trip est l’occasion de nouvelles rencontres, de nouvelles amitiés… Et donc de nouveaux éclairages sur cette Amérique complètement barrée. Oui, le jeu est bavard (en même temps, dans un jeu qui donne autant d’importance aux mots, c’est logique). Il est loquace, mais il l’est à juste titre : pour solidifier le scénario, et non pour faire du remplissage !
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Comme on a pu le voir dans les trailers, certains passages vous obligeront à casser des bouches ! Le combat de base est assez classique, bien que plutôt dynamique : on presse une touche pour balancer des coups, et on vide la barre de l’adversaire pour le mettre KO. Mais le jeu devient beaucoup plus intéressant lorsque vous utilisez votre Voca. Votre pouvoir, qui se partage en deux formes : le Cri à utiliser pendant les combats, ou le Vox qui vous permet de contrôler l’esprit d’une personne. Une fois votre jauge chargée par des coups de base, il suffit de presser R2 pour crier un mot, qui devient un ordre. Et votre pouvoir, ce sont justement les mots et leur effet : « Push » envoie valdinguer vos adversaires, quand « Block » les paralyse, etc. De plus, vous pouvez aussi provoquer l’ennemi, avec le coup puissant qui va avec.
Puisque vous vous glissez dans la peau d’un groupe de musique, vous allez donner… Des concerts ! Et là, à plusieurs occasions, Dustborn devient aussi un jeu de rythme ! Avec des QTE, un peu à la façon d’un Guitar Hero ou d’un Hatsune Miku, il vous demande alors de presser les touches avec rythme et précision… Et passer pour des baltringues quand vous devez jouer devant des soldats de la Justice, ça peut avoir des conséquences ! Ces phases musicales, vous les retrouverez aussi à l’occasion de répétitions. Toute cette variété de gameplay est idéalement dosée pour nous changer d’air quand il le faut, sans alourdir le jeu.
Quelques petits trucs à corriger
D’ailleurs, puisqu’on en parle, vous aurez de nombreux choix à faire, qui auront des conséquences sur le déroulement de l’histoire ! Quand beaucoup de jeux narratifs utilisent cette ficelle sans vraiment l’exploiter, Dustborn ne nous ment pas sur cet aspect… Et vos choix vous mèneront vers plusieurs fins alternatives ! Les choix seront liés aux situations rencontrées, mais aussi aux nombreuses phases de dialogue avec vos équipiers. De votre attitude dépendront les liens qui se renforceront ou s’effriteront au fil de l’aventure. Et de vos rapport avec les autres dépendra l’efficacité de vos comparses.
Jusque là, c’est du tout bon, et Dustborn coche une par une toutes les cases de l’incontournable. Pourtant, quelques petites pétouilles méritent que l’on s’y attarde. Ou du moins, elles méritent d’être signalées afin d’être corrigées à l’avenir… À commencer par quelques petites fautes d’orthographe dans les sous-titres en VF. Rien de bien méchant : une petite faute d’accord par ici, une inversion de lettres par là… Pas de quoi bouder le jeu, mais ces petits détails font un peu tâche dans un projet qui, jusqu’alors, nous est apparu comme extrêmement soigné. Un peu comme si le premier de la classe laissait une grosse tache d’encre sur la première page de sa copie double.
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D’ailleurs, puisque l’on parle de langues, on peut aussi évoquer le doublage. Que l’on soit bien d’accord : les dialogues en Anglais sont de qualité, dans le ton, et le jeu de certains acteurs contribue à nous plonger dans l’ambiance décalée du titre. Mais un jeu de ce niveau mériterait sa VF ! D’autant que tous les joueurs ne maîtrisent pas la langue de Shakespeare. Et que nous avons en France de bons doubleurs, et de nombreux jeux vidéo en attestent. Ici, la question est sans doute essentiellement financière, et ce malgré l’entrée de Quantic Dream et de sa puissance de feu dans le projet. Mais on se plait à rêver d’une version traduite de Dustborn, dans laquelle on pourrait profiter de son ambiance sans avoir les yeux rivés sur les sous-titres. Ce point n’est donc pas vraiment un défaut, juste une suggestion à l’attention des développeurs.
Enfin, et on a vu venir ce dernier point noir de loin… Ce road-trip à travers la République d’Amérique s’avère au final assez linéaire. Dommage tant cet appel au voyage nous a donné l’envie de parcourir les grands espaces américains. Ici, l’aventure se découpe en chapitres qui ne sont, in-game, rien d’autre que les différentes étapes de votre bus sur la carte des États-Unis. Dommage : on aurait aimé davantage d’exploration.
Au final
Jeu un peu difficile à définir, si on devait comparer Dustborn à d’autres œuvres de la culture populaire… Il serait sans doute un mix entre Saints Row et Scott Pilgrim pour son ambiance, avec des graphismes à mi-chemin entre Borderlands et une version moderne de Jet Set Radio. Vous l’aurez compris : on a aimé Dustborn pour sa direction artistique cell-shadée tout droit sortie d’un Comics… Pour son ambiance globale… Pour son histoire passionnante… Ou pour son gameplay qui joue la carte de l’éclectisme… Ou encore pour sa bande-son énergique… Comme quoi, pour faire un bon jeu, avoir de l’argent c’est bien, mais avoir de bonnes idées c’est encore mieux !
Au final, Dustborn est la bonne surprise de ce mois d’août 2024 ! Et après les 15 heures (environ) nécessaires pour voir le générique de fin, il laisse la frustrante sensation que vous pouvez ressentir lorsque vous venez de binge-watcher une série qui vous a marqué… C’était bien mais c’est fini, et on aurait bien pris un peu de rab ! Vous repenserez encore à ce road-trip quelques temps après avoir vu défiler le générique de fin, ce qui est habituellement un bon signe ! Si vous aimez les jeux narratifs à l’ambiance survoltée et aux propos engagés (bien que Dustborn ne joue pas toujours la carte de la subtilité sur ce point), vous pouvez foncer, dès la sortie du jeu le 20 août ! Dustborn est une pu… de bonne surprise, et on pèse les mots !
Dustborn
- Par : Red Thread Games, pour Spotlight by Quantic Dream
- Sur : PlayStation, XBox, PC (Steam, Epic)
- Genre : jeu narratif, action/aventure
- Prix : 29,99€
- Classification : PEGI 16
- Conditions de test : testé sur une version PS5 fournie par l’éditeur
- Disponibilité : le 20 août
- Page officielle
Les points positifs
- La direction artistique
- L’ambiance globale
- Facile à prendre en main
- Les différentes boucles de gameplay qui tuent la monotonie
- Une âme et un univers bien à lui
- L’histoire passionnante et pleine de rebondissements
- L’écriture des personnages
- La bande-son entraînante
- Des sous-titres en VF
- Un prix mini
Les points négatifs
- Un jeu que certains trouveront très verbeux
- Quelques fautes d’orthographe dans les sous-titres
- Voix seulement en Anglais, pas de doublage VF
- Au final, les différentes phases deviennent inévitablement répétitives
- Un jeu assez linéaire au final
- Quelques gros clichés que l’on sent venir