J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle, et je commence par la mauvaise ! Yakuza 6 : the Song of Life sera le dernier épisode à mettre en scène ce cher Kazuma Kiryu ! La bonne, c’est que le jeu de Sega sort le 17 avril, et que c’est une bombe ! Et son test, c’est pour maintenant !

La meilleure série de Sega ?

Yakuza 6

Je dois être honnête avec vous : il y a un an, je ne connaissais pas Yakuza plus que cela. J’avais évidemment entendu parler du jeu, qui existe quand même depuis 2005. Mais, je ne sais pourquoi, je pensais qu’il ne s’agissait que d’un bête jeu d’action mettant en scène des voyous, qui passaient leur temps à se battre !

Et puis, grâce à Koch Media (un big-up au passage ^^), j’ai découvert Yakuza Kiwami, le premier épisode de la série, refait pour la PS4 (lire le test ici). Une révélation ; une claque ! Un jeu avec une âme, avec des personnages charismatiques, avec un scénario à tomber ! En un an, je suis devenu un pur fan de la série, me jetant sans hésiter sur Yakuza Zero sorti quelques mois plus tôt… Et l’envie de collectionner tous les épisodes de la série !

Si la saga Yakuza commence à se faire un nom en Europe, avec une communauté de fans grandissante, elle est un monument au Japon ! Car sur l’archipel, Ryu ga Gotoku (de son vrai nom, littéralement Comme un Dragon) est une série archi-populaire. Au Pays du Soleil Levant, elle constitue même la franchise de Sega la plus plébiscitée, très loin devant un certain Sonic the Hedgehog !

Pour ses graphismes photoréalistes, pour son ambiance, ou pour la façon dont elle décrit avec fidélité le Japon et la vie à Tokyo… Yakuza pourrait même être comparée à une autre grande série de Sega : Shenmue. Mais avec un univers qui va… Vous remuer les tripes !

Un « vieux » Dragon de Dôjima !

Comme son nom l’indique, Ryu ga Gotoku va donc vous plonger dans l’univers très secret des Yakuzas. Des organisations criminelles que les Japonais appellent aussi Bōryokudan (groupes violents). Un terme que les « Yak » considèrent comme une insulte, car si la violence fait partie de leur quotidien, leur credo repose sur un code d’honneur qu’ils respectent à la lettre. Organisés en « familles » , les Yakuzas obéissent à un « patriarche » qui n’est autre que le chef de chaque groupe.

La série met en scène l’un de ces Yakuzas : Kazuma Kiryu (doublé par Takaya Kuroda). Costard blanc impeccable, chemise rouge, voix grave mais homme pas vraiment loquace… Ce gros dur au coeur tendre maîtrise toutes les arcanes du combat de rue. Il est une légende, et tous tremblent à l’évocation de son surnom : le « Dragon de Dôjima » ! Comme tous les Yakuzas, il porte un tatouage : son dos est orné d’un dragon, justement…

Avec la série, le joueur a vu évoluer Kiryu. Il avait 20 ans dans Yakuza 0. Aujourd’hui, dans Yakuza 6 : the Song of Life, il approche de la cinquantaine. C’est donc un Kiryu plus âgé que le joueur va incarner. Le poids des années se fait sentir, notamment lorsqu’il s’essouffle en pleine course, même si notre héros est toujours aussi fougueux !

Yakuza 6 reprend fort logiquement l’histoire là où elle s’était arrêtée dans Yakuza 5. Après trois (nouvelles) années de prison pour ses actes passés, Kiryu espère retrouver une vie tranquille auprès de l’orphelinat qu’il a créé à Onomishi, ville rurale près d’Hiroshima. Sa fille adoptive, Haruka, a décidé quant à elle de stopper sa carrière d’idole pour vivre elle aussi à l’orphelinat. Mais comme dans chaque épisode, Haruka est une victime colatérale de la réputation de Kiryu. Et lorsque celle-ci est gravement blessée dans un mystérieux accident, Kiryu décide de revenir à Kamurocho pour y faire le ménage… Avec une « surprise du chef » : il doit aussi s’occuper du bébé d’Haruka.

Dragon du XXIe siècle

Si la série Yakuza est l’une de mes préférées, c’est aussi parce que, derrière le jeu d’action se cache un titre plus subtile qu’il n’y paraît. La licence est aussi une bonne critique de notre époque, de la société japonaise. Avec un regard naïf au premier abord, mais plus pertinent qu’on ne le pense, elle reflète virtuellement une société bien réelle. Pas toujours rose, avec ses qualités, mais aussi ses défauts… Mais qui est avant tout humaine !

Yakuza 6 se déroule en 2016. Kamurocho s’est modernisée (vous reconnaîtrez les rues, mais serez parfois perturbé par ses changements). Et ce bon vieux Kiryu a su évoluer avec son temps ! Le menu passe désormais par un smartphone (un Xperia, pour les connaisseurs) qui, comme les vrais, permettra à votre héros de tout faire. Notre « vieillard » (comme le surnomment les voyous) est un héros 2.0, qui a su s’adapter à son époque (en même temps, pas trop le choix).

Le monde de Yakuza a lui aussi évolué avec son temps, s’en est approprié les thématiques et les préoccupations. Kiryu devra donc se faire à l’idée que l’on rencontre aujourd’hui l’âme soeur en passant par des live-chats, ou par une application de dating. Ou que sa fille adoptive ait pu caresser l’espoir de devenir une célèbre « idole » , à mi-chemin entre la chanson et la télé-réalité.

Le jeu aborde des thèmes ô combien d’actualité. Les mafias japonaises ne gouvernent plus, et se font mettre sérieusement à l’amende par les triades chinoises. Et Kiryu se voit aussi, par exemple, confronté à la question des jeunes mamans solo, avec une fille (que l’on a découvert enfant) aujourd’hui mère. Notre homme d’honneur devra ranger son coté « tradition » pour s’ouvrir à la « modernité » !

Le « Dragon Engine » fait des merveilles !

Le Dragon-Engine est le nouveau moteur utilisé pour le développement du jeu. Et force est de constater qu’il fait superbement le job : le gap graphique est incontestable, ne serait-ce qu’en comparaison avec Kiwami ! Mais ça tombe bien, puisque ce moteur va être poussé dans ses retranchements, ne serait-ce qu’avec une mise en scène aux petits oignons. Il permet également d’effacer les temps de chargement, lorsque vous entrez dans un bâtiment, par exemple !

Et c’est sans doute l’aspect du jeu qui va vous sauter aux yeux en premier : Yakuza 6 est un titre magnifique ! La modélisation des personnages est superbe, avec un soucis du détail renversant. Et le jeu va multiplier les gros plans pour vous balancer au visage le grain de peau, les pores, les rides, les gouttes de sueur, ou le détail des dents. On peut par exemple, rien qu’en observant son regard, savoir si Kiryu est en colère, triste, content…

Je prends un billet pour le Japon !

Jamais le quartier fictif de Kamurocho n’a été aussi beau (la nouvelle zone au style « Chinatown » est magnifique). Les néons vous éclatent au visage, les rues fourmillent de petits détails, les PNJ vacquent à leurs occupations… Le jeu restitue avec fidélité l’ambiance de la rue, l’ambiance du Japon… Ou plutôt, il ne la reconstitue pas, mais vous y transporte ! Et ce, que le jeu s’affiche en 30fps (la plupart du temps) ou en 45 ou 60fps (lors de certaines phases de jeu). Je ne l’ai pas précisé, mais Yakuza 6 est optimisé pour la PS4-Pro.

Bien sûr, on pourra pinailler sur quelques petits détails qui viennent « tuer » le réalisme du jeu : les adversaires vaincus qui disparaissent comme par magie, les murs invisibles, et des soucis de collisions avec des objets dans la rue (enseignes, vélos…), des PNJ clônés. Mais toujours avec ce point fort, martelé à chaque instant : Kamurocho a beau être virtuel, ce quartier est crédible !

S’entraîner, boire, manger, dormir…

Kiryu a beau être puissant, il n’en demeure pas moins humain. Aussi, n’espérez pas voir votre barre de vie revenir à la normale après chaque combat. Pour retrouver des forces, rien de tel qu’un bon burger ou un bon canard laqué. Et notre héros devra pour cela aller dilapider son argent dans les restaurants ou au konbini (supérette japonaise) du coin. Le jeu vous offrant une énorme liberté, vous pourrez même siroter un p’tit verre d’alcool au bar. Mais comme dans la vraie vie, il faut consommer avec modération, gare aux effets secondaires : un Kiryu bourré a beaucoup plus de mal à se défendre !

De même, vous pourrez vous entraîner dans une salle de gym, avec un coach personnalisé. Il vous donnera des conseils pour améliorer votre forme physique… Mais s’improvisera aussi diététicien. À vous de voir si vous allez suivre ses conseils ou non…

Pour le reste, le jeu offre de nombreuses mécaniques empruntées au RPG. Les ennemis vaincus vous permettent d’obtenir de l’argent et des points d’XP qu’il faudra répartir afin de gonfler vos compétences (et en développer de nouvelles).

Quelques soucis de collisions

Le système de combat a été lui aussi revu, pour devenir plus instinctif, plus ergonomique. Les touches vous permettent d’enchaîner les combos, avec une barre de rage qui se charge et se libère avec R2. Des QTE vous permettent alors de déclencher des scènes à la fois nerveuses et jouissives. J’en avais presque oublié que Yakuza est aussi connu pour ses pétages de gueules ! Mention spéciale aux ennemis qui volent à vingt mètres : pas vraiment réaliste, mais terriblement fun !

Avec toutefois un bémol : cette simplification du système de combat nous fait perdre au passage l’option qui nous permettait, dans Kiwami par exemple, d’alterner les quatre styles de combat. On passe  désormais progressivement de l’un à l’autre, automatiquement. Le sphérier de compétences a lui aussi disparu, pour être remplacé par de simples lignes. Mais la mécanique reste la même : on distribue les points en fonction de ce que l’on souhaite améliorer.

Cool… and the gangs !

Et voici une petite nouveauté qui apporte un grand vent de fraîcheur sur la série ! Sega introduit dans cet épisode un mécanisme qui va vous permettre de constituer votre propre gang. Habitué aux baston en solo, Kiryu apprend maintenant le combat en groupe, à l’instar de Jacob Frye et ses Rooks dans Assassin’s Creed Syndicate ^^…

Ce mode « Clan Creator » est celui qui risque de vous occuper un bon moment. Car on ne parle plus ici des mini-jeux qui permettent de tuer le temps, mais bel et bien d’une mécanique qui apporte un vrai plus à la série. Six chefs de clans (les Six Lunatics) vous attendent à Kamurocho et Onomishi, et pour les battre, il va vous falloir le temps de constituer une véritable équipe de durs !

► Lire aussi : Créez votre propre clan dans Yakuza 6 : the Song of Life

Pour cela, vous allez devoir faire parler les poings, pour mater certains voyous et obtenir leur allégeance. Et lorsque vous les avez recrutés, place au spectacle ! Une fois n’est pas coutume, Kiryu reste en retrait et donne les ordres. Il envoie ses « petites mains » nettoyer les rues et botter du fessier de chef de gang. Mais attention : vos alliés ne vous aident pas gratuitement, et les solliciter a un coût. Finalement, ce mode s’avère plus stratégique qu’on ne le pensait.

Une énorme « star » au casting

S’il est un aspect de Yakuza 6 qui ne pourra que séduire les cinéphiles, c’est bien la présence dans le jeu d’une immense star japonaise, un grand monsieur et sans doute mon acteur japonais préféré : Takeshi Kitano. En même temps, est-il surprenant de retrouver ici un acteur qui a autant campé des rôles de yakuzas au cinéma ?

Réalisateur, acteur, animateur de télévision, humoriste, artiste-peintre et plasticien, écrivain et poète, chanteur… On pourrait s’étendre pendant des heures sur le CV du réalisateur de Hana-Bi, L’Été de Kikujiro ou Violent Cop ! Mais pour l’anecdote, il est amusant de le retrouver dans un jeu vidéo… Ce Kitano qui réalisait, en 1986, un jeu du nom de Takeshi no Chōsenjō (Le défi de Takeshi), un soft réputé difficile sur Famicom (NES).

Lire aussi notre test de Yakuza Kiwami

Sans vous spoiler le jeu, « Beat Kitano » (de son petit surnom) joue ici le rôle d’un vieux tueur à gages, Toru Hirose, qui se prend d’affection pour Kazuma Kiryu. Ayant perdu ses parents pendant la Guerre, il est entré dans un gang à l’âge de 14 ans. Et on en sait finalement assez peu sur cet homme au passé très obscur…

Kitano n’est pas le seul acteur connu dans Yakuza 6. Vous pourrez aussi y croiser Tatsuya Fujiwara (Battle Royale, Death Note), qui incarne ici le personnage de Yuuta Usami.

Des mini-jeux par centaine

C’est l’une des grandes forces de la série Yakuza : outre l’histoire principale, vous pouvez aussi vous accorder des petites pauses dans des bars, dans des magasins, pour des activités annexes. Jouer aux fléchettes, au baseball, aux UFO-Catchers, faire du karaoke ou jouer aux jeux vidéo sur bornes d’arcade… Il y a toujours de nombreuses activités à faire dans Yakuza. Et le sixième opus ne déroge pas à cette règle.

Mais Sega oblige, on appréciera aujourd’hui de retrouver deux monuments du jeu vidéo, qui constituent deux jeux dans le jeu. Le premier n’est autre que le jeu de combat Virtua Fighters 5 ; le second est le puzzle-game Puyo-Puyo. Mais je ne parle pas d’une vulgaire démo, comme beaucoup de titres auraient pu nous le proposer. Ici, les combats ou les tableaux s’enchaînent, et vont vous permettre de progresser réellement (on peut même retenter sa chance après un game-over).

► Lire aussi : Yakuza 6, une « Madeleine de Proust » des rétro-gamers ?

Cerise sur le gâteau, depuis le menu d’accueil, vous pouvez même choisir un mode vous permettant de jouer en multijoueur à ces deux titres. Yakuza 6 est un jeu solo, mais ce mode vous propose de défier un ami. Le clin d’oeil est vraiment sympa, et on ne peut qu’apprécier la démarche !

Comment aborder le scénario ?

J’avoue que c’est la question qui me turlupine le plus ! L’intrigue de Yakuza 6 est relativement difficile à approcher car… Il existe deux façons de découvrir les aventures de Kiryu : dans l’ordre ou le désordre ! Car si chaque épisode peut être joué indépendamment, les six opus constituent un tout. Une histoire qui prend véritablement consistance si vous faites les épisodes dans la continuité, dans l’ordre chronologique. Ce que je vous conseille.

Et je reconnais que je suis aujourd’hui frustré de « passer du coq à l’âne » : après avoir joué à Kiwami (remake du premier), puis à Yakuza 0 (préquel)… J’aborde aujourd’hui le sixième volet, avant de me jeter en août sur Kiwami 2 (remake du second épisode). Avec une volonté féroce de mettre la main sur les autres épisodes (3, 4 et 5 sur PS3), pour refaire tous les volets dans l’ordre !

Toujours est-il que ce sixième opus comble partiellement ce manque, en nous proposant un historique de la série, un résumé de chaque volet. Les nouveaux venus ne seront donc pas largués. Mais si l’intention est bonne, Yakuza est une série qui se joue… Espérons que Sega aura la bonne idée de rebooter également les épisodes 3, 4 et 5 😉

J’approche de la fin de ce test, et je réalise que j’ai oublié de vous parler d’un détail qui a son importance ! Le jeu est lu en Japonais, mais ne bénéficie que de sous-titres en Anglais. Hélas, pas de VF à l’horizon. Le niveau n’est pas inabordable, mais peut rebuter les anglophobes. On saluera cependant le fait que, pour la première fois, tous les dialogues du jeu sont doublés.

 Au final

Tous les goûts sont dans la nature, et cet avis n’engage que moi ! Mais en ce qui me concerne, Yakuza 6 est une véritable claque ! Si les précédents épisodes avaient fait de la licence une saga que j’apprécie particulièrement, ce sixième épisode hisse Yakuza au rang de mes séries préférées sur consoles !

Et je dois vous avouer que j’ai longtemps hésité sur mon titre, me demandant si le terme de « chef d’oeuvre » n’était pas galvaudé. Et force est de reconnaître que non ! Yakuza 6 est bel et bien un chef d’oeuvre dans la mesure où il sublime la série, tout en s’imposant comme l’un des meilleurs jeux du moment. Yakuza 6 est bien un chef d’oeuvre, contemplatif et extrêmement riche. Et la Team Ryu ga Gotoku (la division de Sega en charge de la licence) nous offre ici son meilleur titre, sa « master-piece » !

Le jeu reste perfectible, avec des défauts parfois récurrents de la série. Mais toujours est-il que Yakuza 6 est visuellement magnifique, son scénario m’a, à la fois, transporté et arraché une petite larme… Avec le temps, je me suis attaché à Kiryu, et mon plus grand regret est aujourd’hui de devoir quitter pour de bon ce héros : le Dragon de Dôjima tire sa révérence ! En beauté, il s’en va avec panache…


Yakuza 6 : The Song of Life

  • Par Sega (Ryu ga Gotoku Team), distribué par Koch Media, sur PlayStation 4.
  • Classification : PEGI 18.
  • Prix : Environ 45€.

 

Un poing c’est tout ! :

  • Le Dragon-Engine fait des merveilles : le jeu est magnifique, un gap graphique incontestable
  • Une ambiance unique
  • Durée de vie conséquente
  • Bonne rejouabilité
  • Takeshi Kitano au casting !
  • Le système de gangs
  • La liberté d’action
  • Des combats nerveux, et plus accessibles
  • L’écriture ! Un scénario poignant !
  • La bande-son
  • Une flopée de mini-jeux et de trucs à faire
  • Un résumé des autres volets pour les débutants
  • Un mode deux joueurs pour Virtua Fighter 5 et Puyo Puyo
  • Un prix plus que correct

Un poing dans la gueule ! :

  • Pas de sous-titres en VF
  • Le dernier épisode avec Kazuma Kiryu 🙁
  • Quelques soucis de collisions
  • Les styles de combat sont passés à la trappe
  • Quelques passages plus mous
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