Saviez-vous que la création de la PlayStation est, en quelque sorte, indirectement due à Nintendo ? La console de Sony est en effet le fruit d’une histoire que certains pourraient qualifier de « trahison » digne d’un scénario de Game of Thrones. Voici ce qu’il s’est passé.

Sony et Nintendo : au début, tout allait bien

Le début de l’histoire entre Nintendo et Sony était plutôt prometteur. Car si, à la fin des années 80, Sony ne croyait pas que le jeu vidéo puisse avoir un avenir… L’un de ses ingénieurs, Ken Kutaragi, était loin d’approuver cette vision des choses. Et c’est contre l’aval de sa direction que Kutaragi va travailler sur le processeur sonore de la Super-Nintendo : le SPC700, surclassant celui de la Megadrive de Sega. Kutaragi est alors sur un siège éjectable, mais finit par convaincre sa direction de le laisser mener le projet à son terme. Après tout, c’est un contrat juteux pour Sony qui se dessine !

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Et quand Nintendo songe à ajouter un lecteur CDRom/XA à sa Super Famicom/SNES/Super-Nintendo… Devinez qui est sur les rangs ? Deux marques possèdent alors les droits d’exploitation de ce support : Sony et Philips. Mais Kutaragi ne lâche pas le morceau, et doit convaincre à la fois Nintendo, mais aussi Sony de s’engager dans le projet… Le parcours est tumultueux, mais il obtient finalement gain de cause : Nintendo et Sony décident de travailler ensemble !

Juin 1991, le salon où tout bascule

Nous sommes maintenant en 1991, au mois de juin, période à laquelle se déroule le CES de Las Vegas (Consumer Electronics Show). Lors de sa conférence, ce n’est pas sans une certaine fierté que Sony annonce le SNES-CD ! Un lecteur CD pour la Super-Famicom… Mais… L’histoire est loin d’être terminée !

Car entre temps, chez Nintendo, Hiroshi Yamauchi (président de Nintendo) épluche le contrat original (de 1988), signé entre Sony et Nintendo. Et il réalise alors que cet accord ne sécurise pas assez à son goût le droit de licence que Nintendo applique aux éditeurs pour chaque cartouche produite. Sony bénéficie des droits pour tous les jeux édités sur ce support CD. De même pour les droits sur la technologie produite. Ce qui, vous vous en doutez, le rend particulièrement furieux !

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Mais revenons à notre salon CES 1991. C’est maintenant au tour de Nintendo de prendre la parole, le lendemain de la conférence de Sony… Et les journalistes attendent d’en savoir plus sur le SNES-CD. Ils ne vont pas être déçus ! C’est le directeur américain de Nintendo, Howard Lincoln, qui est au micro. Et à la surprise générale, il annonce au monde entier que le lecteur CD de Nintendo va se faire avec… Philips. Dans le plus grand secret, Nintendo a négocié un nouveau contrat avec Philips, beaucoup plus avantageux : il donne à Big N 100% des droits sur les jeux et le matériel fabriqué.

En réalité, la console de Philips ne verra jamais le jour. En guise de compensation, Nintendo autorisera Philips à exploiter ses personnages (Mario et Link) dans des jeux de sa future console CD-I.

Pour Sony, c’est la douche froide ! En public !

Sony se ressaisit, et se lance sur le marché des consoles

Pour Sony, la trahison de Nintendo est double. D’une part, la firme de Kyoto lui donne un coup de couteau dans le dos, devant tout le monde… D’autre part, elle fait appel à une société européenne, et non à un compatriote japonais, ce qui est très mal vu.

Sony, pas vraiment convaincu du potentiel des consoles et des jeux vidéo, aurait préféré en rester là. Mais la marque peut compter sur l’opiniâtreté de Ken Kutaragi. C’est lui qui s’est déjà battu précédemment pour que Sony s’engage sur le développement du lecteur CD de la Super-Famicom… Aujourd’hui, il veut convaincre sa direction du bien fondé de créer une console 32 bits à part entière… Une console 100% Sony, cette fois ! Il lui suffit de reprendre ses travaux, réalisés pour le SNES CD

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Nintendo lance ses avocats dans la bataille, d’une part pour rupture de contrat de la part de Sony… D’autre part pour l’empêcher de réutiliser le nom du lecteur SNES-CD : Play Station. Mais le juge fédéral des Etats Unis donne raison à Sony, qui pourra utiliser ce nom en toute légalité.

Quelques mois plus tard, en octobre 1991, Sony annonce sa propre console : la Sony Play Station, qui deviendra par la suite PlayStation. Avec le succès qu’on lui connaît, dès sa sortie en 1994. La console de Sony va se vendre à plus de 104 millions d’exemplaires dans le monde pour, quelques années plus tard, se hisser en tête des ventes, en entraînant la chute de Sega, au passage… Sans le savoir, Nintendo a permis la naissance d’un colossal rival !