Entre son annonce et sa sortie le 25 janvier dernier, Resident Evil 2 aura suscité deux réactions bien distinctes. Tout d’abord un « Oh sérieux ? Encore un nouveau remake HD de jeu rétro ? » suivi, dès les premiers trailers, par un « Oh putain, la vache ! » Aujourd’hui, j’ai comme une envie de voir laquelle correspond le mieux à cette revisite. Pour ça, rien de mieux qu’un bon gros test des familles…

1998-2019 : l’horreur est de retour

Nous sommes en 1996. Capcom, que l’on connaît entre autres pour Mega Man ou Street Fighter, lance une nouvelle licence qui va marquer les joueurs, et inscrire son nom en lettres de feu dans la culture pop : Resident Evil (ou BioHazard en japonais). Un nouveau survival-horror qui, à défaut d’inventer le genre comme le pensent certains (ses créateurs se sont inspirés notamment du français Alone in the Dark), va le sublimer. Enfermé dans un manoir, vous êtes un membre de l’unité d’élite S.T.A.R.S (Chris Redfield ou Jill Valentine). Et devez survivre à une horde de zombies et autres monstres en tous genres.

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Deux ans plus tard, Hideki Kamiya et Shinji Mikami récidivent. Un deuxième épisode de Resident Evil est de sortie. Plus beau, plus jouable, une histoire encore mieux ficelée et qui renforce le lore de la série, des challenges en plus… Le jeu tient cette fois sur deux disques, chacun étant consacré à un personnage (et donc quatre points de vue si l’on compte les deux scénarii bonus, et autant de niveaux de difficulté différents) de l’aventure : Leon S. Kennedy et Claire Redfield, soeur du héros du premier opus.

Capcom a surpris la communauté de fans en juin 2018, pendant l’E3. Si le jeu avait été teasé en 2015 (puis oublié), l’éditeur japonais confirmait alors qu’un remake de Resident Evil 2 est en développement. Les avis étaient partagés, certains craignant un énième remaster low-cost, juste pour se faire un peu d’argent sur une licence populaire. Mais les premières images diffusées mettaient tout le monde d’accord. Avec des séquences qui rappellaient visuellement le très réussi Resident Evil 7, on ne parlait déjà plus du même jeu…

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Un terrain de jeu plus grand… Mais plus étriqué

Resident Evil 2 fait donc suite au premier opus, et aux événements qui se sont déroulés dans le manoir. On y retrouve Claire Redfield, à la recherche de Chris, son frère disparu suite à ces événements. Elle partage le scénario avec Leon S. Kennedy, un jeune officier de police fraîchement affecté à Raccoon City.

Le premier épisode avait cultivé l’oppression à huis-clos dans son manoir, ce second opus prend le même chemin, cette fois dans les couloirs du commissariat de Raccoon City. Avec toutefois quelques bouffées d’air frais à l’extérieur, si l’on peut dire. Séparés dès le début de l’aventure, nos deux héros vont suivre des parcours différents…

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Les fans de la première heure retrouveront aussi tous les ingrédients de la première mouture. Tels que les différentes énigmes réparties dans le commissariat, ces saloperies de Leakers… Voire quelques boss mémorables, tels que le T-00 (Mr X), cette ébauche du Nemesis de RE3 qui vous harcèle tout au long de l’aventure. Mais attention : désormais, il est plus collant 😉

Ce qui frappe, concernant le level-design, c’est cet étrange paradoxe : graphismes de 2019 obligent, les décors sont plus beaux, plus détaillés, et le changement de caméra nous fait paraître le commissariat plus gigantesque et labyrinthique encore. Pourtant, l’ambiance est telle que ces environnements sont tout autant étouffants, semblent parfois plus étriqués. Claustros s’abstenir ! Un fait qui s’inscrit dans les différents mécanismes de peur, parfaitement maîtrisés par Capcom

Ce n’est plus le même jeu

Voilà l’impression générale qui résume ce remake. Visuellement, Resident Evil 2 n’a plus rien à voir avec son aîné. Oubliez les écrans fixes de la première mouture, vous allez maintenant vous déplacer dans un monde en 3D, en vue 3e personne. Autrement dit, Capcom reprend l’aspect visuel qui a si bien marché dans Resident Evil VII pour sublimer le coté horrifique de ce portage que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître.

Les écrans fixes de l’opus PS1 faisaient monter la pression, notamment avec ces zombies hors-champ, que l’on entendait arriver sans savoir où ils se trouvaient. Avec la 3D, ce mécanisme n’a plus lieu d’être. Alors, il est remplacé, hélas pour vos petits coeurs, par des jumpscares à tout va. Le pire, c’est que comme dans les bons vieux films d’horreur des années 90, on les sent venir, mais ils font toujours leur petit effet.

Les capacités graphiques actuelles font aussi que, lorsqu’autrefois des bouillies de pixels rouges symbolisaient le sang… Les ventres éviscérés et autres plaies béantes sont aujourd’hui beaucoup plus réalistes et détaillés. Oui, lors de certaines scènes, Resident Evil 2 est vraiment dégueulasse. Capcom entend bien montrer « qui a la plus longue » et ne se prive donc pas de jouer sur l’aspect gore du jeu, sans aucune retenue. Rappelons que le jeu est classifié PEGI 18 !

Le Resident Evil 2 de 1998 était gore, mais pas plus effrayant que ça. Du moins, je ne me souviens pas avoir vraiment flippé avec ce jeu que j’ai pourtant retourné dans tous les sens, terminé à de multiples reprises. Aujourd’hui, la donne est différente. Et même le joueur aguerri que je suis a eu quelques frayeurs avec cette version 2019. Le RE2 nouveau est malaisant, effrayant par moments… En témoignent ces pièces où, sachant ce qui m’y attendait, j’ai parfois hésité à franchir le pas… Lorsqu’autrefois je serais entré la fleur au fusil.

Un jeu entièrement re-designé

Le lifting graphique (à l’aide du RE Engine utilisé dans le septième opus) ne concerne pas uniquement vos personnages principaux. Claire et Léon sont beaucoup plus glamour aujourd’hui mais… Pas que ! Et s’il est un aspect que j’apprécie grandement, c’est la véritable réécriture graphique qui a été effectuée sur les ennemis. Quand autrefois vous croisiez des clones zombifiés, les monstres ont aujourd’hui une identité, le jeu joue la carte de la diversité, pour encore plus de réalisme. Rien que pour les zombies par exemple, vous croiserez des hommes, des femmes, de toutes ethnies confondues, des petits, des balèzes, des gros, des maigres…

Le cadre (le commissariat) est le même qu’en 1998. Mais le passage à la 3D offre à la carte un aspect très différent, une architecture revue et corrigée. Je me souviens encore très bien du jeu, je le connais par coeur. Pourtant, l’architecture des niveaux a réussi à me surprendre. J’ai eu à de multiples reprises, encore une fois, cette impression de découvrir un nouveau jeu. Sans doute est-ce aussi lié au fait que des énigmes ont aussi été quelque peu changées… En revanche, les aller-retours entre les différentes zones sont toujours là !

2019 est une autre époque, qui permet bien des choses qui étaient impossibles l’année de la première étoile des Bleus. La vue caméra-épaule ne souffre d’aucun ralentissement, et l’ensemble est fluide. Fait d’autant plus appréciable que le jeu tourne en 60fps du début à la fin… Histoire de nous plonger dans le cauchemar avec encore plus de réalisme.

Le gameplay aussi a changé

C’est un fait, ainsi fonctionne notre mémoire : nous avons tendance à embellir nos souvenirs. Et certains jeux qui sont pour nous des hits d’un autre temps, étaient en réalité de véritables purges. Et c’est le cas pour la série Resident Evil, avec notamment sa jouabilité exécrable, et ses personnages qui mettent dix ans à se tourner vers l’ennemi pour lui tirer dessus… Mais à l’époque, nous n’avions pas d’autres références, ou devrais-je dire, nous n’avions pas encore tâté des technologies actuelles… Alors, c’était génial !

Bonne nouvelle ! Avec ce remake de RE2, vous pouvez oublier la jouabilité très approximative des premiers opus. Ceux qui ont joué au septième volet retrouveront leurs vieux réflexes, et la fluidité que nous avions alors tant apprécié. Cependant, certains points n’ont pas changé d’un iota. Comme par exemple la nécessité absolue de trouver des munitions (et de les économiser), sous peine de devoir affronter des hordes de zombies avec seulement trois balles. D’autant que le jeu est plutôt radin lorsqu’il s’agit de vous offrir des chargeurs.

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On appréciera aussi quelques nouveautés dans le gameplay qui, on ne va pas se mentir, sont les bienvenues. La première est la possibilité de condamner des fenêtres en y cloutant des planches. Une barricade de fortune, mais qui a le mérite de vous soulager lorsque le commissariat se la joue « journée portes ouvertes » ! Autre nouvelle mécanique notable : lorsqu’un ennemi s’approche suffisamment pour vous choper, vous pouvez désormais vous dégager en lui plantant une arme ou un objet dans le cou ou dans le crane.

Mais les changements ne concernent pas uniquement vos héros. Et vous allez aimer détester ces zombies désormais plus véloces. En 1998, ils se déplaçaient lentement, avec la vigueur d’une file d’attente au supermarché. Ils sont désormais plus rapides, vous surprennent plus souvent… Et accessoirement, sont plus résistants aux balles… Ce qui va vous obliger à revoir votre approche. Lorsqu’autrefois, le joueur avait tendance à viser la tête pour neutraliser les morts-vivants, on préférera cette fois cibler les genoux afin de les rendre plus inoffensifs… Ou disons moins mobiles, pour les finir tranquillement.

En revanche, la donne est bien différente avec ce pot-de-colle de MrX, dont le son des pas suffit à lui seul à vous avertir que vous allez passer un sale moment. Une fois à vos trousses, il ne vous lâche plus.. Et c’est vous qui devrez mettre les quêtes en cours entre parenthèses pour tenter de semer votre colosse de compagnie. Resident Evil 2 n’est clairement pas un jeu facile, et offre quelques pics de difficulté qui, ajoutés à la peur, risquent de refroidir les plus réfractaires.

Une excellente durée de vie

Certains ont pu avoir la crainte d’un jeu facilité. Après tout, c’est dans l’ère du temps et, pour être honnête, les joueurs sont globalement peu habitués aujourd’hui aux jeux difficiles. Mais rassurez-vous : si le jeu ne tient que sur un seul CD, il va vous en donner pour votre argent !

Vous aurez compris que la quête principale se déroule en deux temps. Vous pouvez soit jouer Léon, soit Claire, comme à la grande époque (si ce n’est qu’il n’y a pas besoin de changer de CD, du coup). D’ailleurs, pour l’anecdote, des statistiques lâchées par Capcom révèlent que 70% des joueurs ont commencé en incarnant Léon. Si l’aventure se plie assez rapidement (une vingtaine d’heures au total), vous ne verrez pas la vraie fin la première fois. Pour cela, il faudra repartir pour un tour, en changeant de personnage. Soit une dizaine d’heures environ par scénario. Petit bémol : si les deux aventures offrent un point de vue différent, les deux restent très similaires, avec quelques redites lors de votre second run.

Que les puristes se rassurent : les deux scénarii bonus sont aussi bel et bien présents. Ils sont soigneusement rangés dans l’onglet bonus. Le premier, intitulé The 4th Survivor, vous permet d’incarner le légendaire Hunk, un soldat d’Umbrella. Un mode particulier puisqu’il va consister en un survival-rush, avec une limite de temps et de munitions. Il se débloque une fois les deux quêtes principales achevées.

Le second mode bonus vous permet cette fois, comme dans le jeu d’origine, d’incarner une barre de… Tofu ! Pour l’obtenir, vous devez terminer The 4th Survivor. Ça peut sembler rigolo, dit comme ça… Mais vous allez vite déchanter en réalisant que ce mode hardcore ne vous laisse qu’un couteau pour arme. Vous allez vite comprendre qu’il n’est pas évident de survivre sans arme à feu…

Est-ce que tout est vraiment rose ?

Les critiques ne tarissent pas d’éloges lorsqu’il s’agit de donner un avis sur ce Resident Evil 2. Mais vous commencez à me connaître, et je n’aurai le sentiment de la tâche accomplie que lorsque j’aurai gratté cette jolie couche dorée.

Tout d’abord, je suis surpris de constater que certaines incohérences, autrefois liées à la technique, soient toujours d’actualité. Quitte à venir pourrir la crédibilité du jeu ou des personnages. Exemple : Léon, le flic sur-entraîné qui n’est pas foutu d’enjamber un trou de 40 cm dans le plancher ? Sérieux ? Un boss vaincu dans un run, mais que vous devez affronter une nouvelle fois dans le second. Un même PNJ qui meurt de deux façons différentes, à deux endroits différents, dans les deux runs ? Là, on ne parle plus de deux points de vue d’une même histoire, mais de dimensions parallèles ! Et je ne parle pas non plus du con qui vous oblige à collectionner des médaillons pour débloquer une sortie de secours…

Si les cinématiques sont de purs régals pour les yeux, j’ai cependant pu noter quelques soucis de synchronisation labiale. Rien de bien méchant, mais j’ai encore en tête quelques séquences où cela saute aux yeux. Un détail surprenant au regard du soin apporté par Capcom au reste de l’oeuvre. Pour rester sur la technique, je suis aussi très surpris par la physique du sang, qui est davantage un effet cosmétique qu’une réelle texture interactive.

Et la difficulté, on en parle ? Alors oui, un jeu difficile de temps en temps, ça ne fait pas de mal. Mais là… Capcom a craqué ! Entre les deux versions, le niveau de difficulté a grimpé encore plus fort que le prix du baril de pétrole ! Une quinzaine de balles pour déglinguer le zombie de base ? Quand on sait que les munitions sont limitées, on sait avant même de commencer le jeu que l’on va voir très souvent l’écran de game-over (qui pour le coup, a été édulcoré avec un joli fondu au noir quand on voyait autrefois Leon se faire dévorer)… La difficulté n’est pas toujours très bien dosée…

Chassez le naturel, et il revient au galop. Capcom est connu pour sa passion des DLC payants… Et Resident Evil 2 n’y fait pas exception. Si les nouvelles musiques du jeu sont plaisantes, et dignes des superproductions cinéma… Il est aussi possible de se procurer les musiques de la version d’origine. Mais pour cela, il faut sortir la carte bleue et investir dans un pack vendu 2,99€.

Enfin, histoire de chipoter, je terminerai pas ce gros regret que Capcom n’ait pas reconduit l’horrifique expérience de la VR. Certes, cela a demandé plus de développement sur Resident Evil 7, mais… Quand on a justement goûté à RE7 en VR, on a du mal à s’en passer. À plus forte raison lorsque l’on nous promet une revisite intégrale du cultissime second opus. Je ne dis pas que Capcom n’y a pas pensé, ou qu’une telle version n’est pas en développement (je n’en sais rien)… Mais RE7 nous a prouvé que la vraie sensation de peur est troublante avec un casque VR, alors… Ça manque !

Au final

C’est sur un blanc, dans la conversation, qui en dit long… Avec le corps recouvert de sueur (froide)… Que s’achève ce test. Le temps de reprendre mes esprits, pour réaliser que je viens de passer un moment mémorable. Il y a les remakes HD de jeux, et puis il y a Resident Evil 2, qui n’a plus rien à voir avec son modèle d’origine ! Dans un labo secret d’Umbrella, Capcom a trouvé la bonne formule entre remake et véritable reboot de Resident Evil 2 !

Car ici, seuls le scénario et les personnages ont été conservés. Tout le reste a été entièrement refait de A à Z. Et force est de constater que, en vingt ans, Capcom a appris à maîtriser son sujet. Les mécaniques de peur sont parfaitement huilées, et les révisions apportées sont suffisamment bien pensées pour insuffler un grand vent de nouveauté sur ce titre.

Resident Evil 2 n’est pas dénué de défauts. Mais ils deviennent vite anecdotiques tant la magie de la refonte opère. Le jeu est longtemps resté une référence, il le redevient encore plus aujourd’hui. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette année 2019 démarre fort, avec un jeu qui passionnera tant les puristes de la série que les petits nouveaux. Vivement Resident Evil 8 !


Resident Evil 2

  • Par Capcom.
  • Sur PS4, Xbox One, PC.
  • Genre : Survival/horror.
  • Classification : PEGI 18.
  • Prix : 59,99€.

 

On aime :

  • Visuellement impressionnant
  • Un bon mix entre remake et reboot
  • Ça tourne nickel en 60 fps
  • Le chara et le level-design
  • Quelques nouvelles mécaniques de gameplay
  • Mécaniques de peur maîtrisées, encore plus poussées
  • Tension du début à la fin
  • Comptez une 20aine d’heures pour en faire le tour

On n’aime pas :

  • Des incohérences scénaristiques
  • Les deux campagnes principales qui se ressemblent beaucoup
  • Les musiques d’origine en DLC payant
  • Toujours des allers-retours incessants
  • Une difficulté parfois mal dosée
  • Il ne lui manque que la VR
  • Il est passé où le « Rez’dent Iveul Two » de lancement du jeu ?
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