Envie de voyager ? Le RPG de Warhorse Studios Kingdom Come : Deliverance nous propose de partir pour la Bohème médiévale. Seul hic : au Moyen Age, la vie n’est pas toute rose, d’autant que nous allons croiser ici quelques mercenaires pas très avenants. L’aventure vous tente quand même ? Alors, c’est parti pour notre test !

Fils de forgeron, largué entre deux rois qui se déchirent

Kingdom Come : Deliverance est un RPG ! Mais un RPG dénué de magie, de dragons, de créatures mythiques ou autres artefacts issus des univers Heroic Fantasy. Le jeu du studio tchèque Warhorse mise avant tout sur le réalisme, sur une approche fidèle de l’Histoire. Et plus particulièrement d’événements se déroulant au XVe siècle, en 1403.

Le jeu nous emmène donc en Bohème, au cœur du Saint Empire Romain germanique. Le bien aimé empereur Charles IV vient de mourir. Et c’est l’un de ses fils, Venceslas, qui hérite de la couronne. Mais Venceslas est considéré comme un roi mou, sans aucune ambition. Ce qui a pour effet d’agacer son frère Sigismond, roi de Hongrie. Lui donnant la bonne idée d’envahir la Bohème en profitant de la faiblesse de son frère, pour l’enlever et le forcer à abdiquer.

Jeu de massacre

Au beau milieu de cette querelle fratricide qui vire à la guerre civile, on retrouve Henry, le jeune héros que vous allez incarner (physiquement, on lui donnerait 30 ans). Henry est le fils du forgeron de Skalice, un petit village de Bohème (un forgeron avec un p’tit air de Chuck Norris, soit dit en passant).

Mais lorsque les mercenaires de Sigismond débarquent à Skalice, c’est pour mieux massacrer les villageois… Et vos parents ! (votre père n’avait finalement que l’apparence de Chuck) Obligé de fuir, Henry se retrouve donc seul, livré à lui-même. Il va devoir apprendre à survivre, et finira par entrer au service du seigneur Hadzig Kobyla, qui organise la résistance contre l’envahisseur… On appréciera d’entrée de ne pas incarner un héros surcheaté, mais un citoyen « banal » de la Bohème médiévale.

Financé par un Kickstarter
Au début de son processus de création, il y a un peu plus de quatre ans, le « petit » studio Warhorse a lancé une campagne Kickstarter pour financer le développement du jeu. Une campagne qui a permis de réunir 1 106 371 £ (35 384 contributeurs).

Vie de Bohème

Comme on a pu le voir précédemment, les développeurs ont mis un point d’honneur à proposer un jeu très réaliste. Cette histoire est en fait un prétexte pour apprendre de nombreuses choses sur la vie médiévale dans l’Europe du XVe siècle. En témoigne le codex plutôt bien fichu qui va vous offrir une très riche documentation sur cette époque, sur les us et coutumes des contemporains d’Henry, sur les règles et sur les pratiques de la chevalerie… KCD remplit à merveille son aspect « bouquin d’Histoire ».

Aussi, vous ne serez pas surpris de trouver ici un monde très réaliste. Si l’on met de coté les répliques très répétitives des PNJ (qui ne connaissent visiblement qu’une phrase, comme dans les RPG des années 80)… On ne pourra qu’admirer la vie dans les villages. Les habitants vaquent à leurs petites occupations quotidiennes, et il sera rare de croiser un PNJ en train de glander dans le décor (hormis les poivrot qui cuvent devant les auberges). Dans KCD, on coupe du bois, on balaie devant sa porte, on cueille des plantes… Et tant que vous ne trucidez pas un innocent devant leurs yeux, la plupart des personnages se foutent royalement de votre présence…

Fidélité historique

Pour permettre à tout ce petit monde d’évoluer, le studio a fidèlement modélisé la Bohème du XVe siècle. Les collines, les forêts et les villages ont sans doute été imaginés… En revanche, pour ce qui est des châteaux ou des bâtiments, la plupart existent réellement (ou ont existé). L’éditeur s’étant même offert de luxe de publier des photos comparatives. Mention spéciale pour les musiques du jeu, aux sonorités médiévales, qui vous plongent encore plus dans cet univers.

De même, les sièges ou les batailles auxquelles vous prendrez part sont des événements qui ont véritablement eu lieu. Des batailles parfois barbares, particulièrement crues… Mais au Moyen Age, lorsque l’on se bat avec des masses d’armes et des hallebardes, on ne fait pas dans la dentelle, et il est facile de perdre un bras. Car oui, l’arsenal de KCD est plutôt varié. Mais encore une fois, Warhorse ne fait ici que mettre, entre les mains de ses personnages, les armes utilisées par les chevaliers du XVe…

Si l’aventure vous ramènera bien souvent à la quête principale, le joueur trouvera ici une grande liberté grâce aux nombreuses quêtes secondaires qui parsèment le jeu. Vous prenez réellement votre destin en main. On reprochera cependant à certaines de ces quêtes de manquer d’explications, de précision. Et il peut parfois arriver de tourner en rond, à quelques mètres de l’objectif.

C’est en forgeant…

On ne va pas vous mentir : Kingdom Come : Deliverance est un RPG très exigeant ! À commencer par la gestion très complexe de votre personnage. Réaliste, mais complexe ! Ainsi, vous allez devoir gérer votre faim, votre fatigue, votre état de santé (gare aux blessures), faire votre toilette régulièrement… Si par exemple, suite à un combat, vous êtes éclaboussé de sang, les villageois partiront en courant dès qu’ils vous verront. Pensez donc à vous nettoyer ! De même, changez régulièrement de tenue en fonction de la situation : une armure vous protège, mais ralentit vos mouvements ; une tenue sombre vous rend plus discret, mais vous rend aussi suspect aux yeux de la population…

Aussi, à l’instar de RPG comme The Witcher, les dialogues vous emmènent régulièrement vers des réponses à choix multiples. Allez vous vous comporter comme un rustre ou comme un gentleman ? Vos réponses auront des conséquences à la fois sur la suite de l’histoire, sur vos relations avec les PNJ, mais aussi sur votre personne. Elles vont en effet vous permettre de gagner des points de force, éloquence, intelligence, santé, etc. Et si la tentation est grande d’interroger des personnages secondaires sur tel ou tel événement, manquer de tact pourra les braquer ; poser la mauvaise question mettra fin à la conversation. Donc, soyez psychologue !

Apprenez à manier l’épée

Certes, Henry a commencé à prendre des cours avant l’invasion du village, à l’insue de ses parents. Mais vous allez devoir vous perfectionner pour espérer survivre plus de dix secondes face aux mercenaires de Sigismond. D’autant que le maniement de l’épée demande un minimum de skill ! Le rythme des combats est lent, et vous demandera un timing parfaitement calibré sur celui de l’adversaire.

Mon intention n’est pas de vous faire ici une thèse en cinq volumes sur le maniement de l’épée dans Kingdom Come : Deliverance. Aussi, pour aller à l’essentiel, sachez que, lors des combats, le gameplay pourrait être comparé à celui de For Honor. Si ce n’est que vous aurez non pas trois, mais cinq points d’impact (autrement dit la tête, les deux bras et les deux jambes). choisissez où vous allez frapper avec le stick directionnel, puis frappez avec R2. La touche R1 vous permet aussi d’estoquer (frapper de la pointe de l’épée).Mais ça, c’est pour l’attaque, et vous devrez aussi apprendre à vous défendre… Donc, entraînez vous !

Quelques frustrations

Viendront ensuite d’autres armes comme les masses, les lances, ou l’arc. Ce dernier, sans viseur et sans jauge de puissance, vous obligera à tirer au jugé… Une plaie, à vrai dire ! Tout comme une autre mécanique tout aussi éprouvante, le crochetage de serrure. Si cette action fonctionnait bien dans Skyrim, elle est ici tellement laborieuse que vous allez incruster la manette dans le mur ! De même, à cause d’un lock automatique déconnant, les combats massifs deviennent vite brouillons : la machine cible l’ennemi au centre de l’écran, et tant pis si vous en combattiez un autre.

Invasion par une armée de bugs

Au premier abord, le jeu est visuellement plutôt chouette. Le cadre est bucolique, voire dépaysant, et les jeux de lumière sont assez réussis. Mais lorsque l’on y regarde de plus près, on réalise très vite que sa réalisation manque de finitions. L’exemple le plus frappant est le manque manifeste d’expression sur les visages des PNJ. Techniquement parlant, on peut dire que Kingdom Come : Deliverance est brut de décoffrage !

Vient ensuite l’épineux problème des bugs. Et là, j’avoue que je ne sais par où commencer. KCD est un vrai festival ! Si le Cry Engine 3 permet d’afficher de superbes panoramas (à la limite du dépaysement), cela devient plus compliqué dès lors que vous vous rapprochez. Les textures manquent bien souvent de finition, et semblent sorties d’un autre âge. Viennent ensuite les traditionnels problèmes de pathfinding, aliasing et consors… Des PNJ qui lévitent, des personnages qui fusionnent, des cadavres complètement désarticulés… Bon OK, ce n’est pas Ubisoft qui viendra jeter la pierre à Warhorse 😉

Parle, mais en silence !

La déception suivante n’est pas vraiment un bug, mais un ratage incontestable : le système de sauvegarde ! Pour sauver votre partie, deux solutions : la sauvegarde rapide, et le Schnaps du Sauveur. La première est gérée par la machine, mais en cas de reboot, vous ramènera au dernier check-point (perdant votre progression non sauvegardée). Le Schnaps du Sauveur est un item (nombre limité) de votre inventaire qui vous permet de sauvegarder quand bon vous semble (mais attention, votre personnage devient momentanément ivre). Ce principe est trop fastidieux, et va devenir franchement une contrainte si vous devez éteindre la console pour un cas d’urgence.

Enfin, on pourrait terminer cette partie en abordant les sons. Si la VF du jeu est plutôt convaincante (des milliers de lignes de textes localisés), vous remarquerez très vite quelques petits soucis de synchronisation labiale. Avec, parfois même, des dialogues qui ne sont pas doublés (le personnage bouge les lèvres en mode « mute » !). Pas vraiment handicapant, mais parfois assez drôle. Mais relativisons : tous ces soucis techniques devraient être rapidement corrigés.

Au final

Kingdom Come : Deliverance est un RPG qui est loin d’être le plus beau. Beaucoup trop de bugs, des personnages inexpressifs, une finition taillée à la débroussailleuse… Mais pu… que ce jeu est bon ! Sa principale qualité est la fidélité avec laquelle il colle à l’Histoire (méconnue) de la Bohème du XVe siècle, au réalisme de ses batailles et des réactions de ses personnages.

Il en résulte un jeu au scénario passionnant, très immersif… Et le simple fait d’éteindre la console vous laissera cette envie de retourner dans l’aventure, afin de voir comment ce diable d’Henry va se sortir de ce pétrin. On y pense encore une fois la console éteinte, c’est bon signe !

Reste que le jeu pourra cependant rebuter pour son approche très technique (trop pour certains), et encore une fois pour ses petits loupés techniques. En espérant que ceux-ci soient rapidement patchés, mais c’est en bonne voie : ceux qui jouent déjà au jeu le savent, pour s’être pris dans les dents un monstrueux patch « day one » de plus de 20 GO. Kingdom Come : Deliverance est donc un jeu à essayer si vous aimez le genre, ou si vous êtes un féru d’Histoire. Mais prévoyez tout de même des pansements, et un gros paquet de jours de RTT !


Kingdom Come : Deliverance

 

Soldat du roi :

  • Un jeu qui colle fidèlement à l’Histoire
  • Une approche plus originale du RPG
  • Les musiques à l’ambiance médiévale
  • Les réponses à choix multiples
  • L’ambiance générale du jeu
  • Le cycle jour-nuit et les effets de lumière
  • Beaucoup de capacités à upgrader
  • Enorme liberté, quêtes secondaires à gogo
  • Les duels, techniques au début, grisants par la suite
  • Le scénario passionnant
  • Grosse durée de vie

Gueux des caniveaux :

  • La parade monstrueuse des bugs
  • PNJ souvent inexpressifs
  • Manque clairement de finition
  • Certaines missions qui manquent d’indications
  • Le crochetage, le tir à l’arc et les combats massifs
  • Le système de sauvegarde à revoir
  • Un énorme patch day-one
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