TEST. – Au Japon, la sortie d’un Dragon Quest est toujours un événement ! Depuis l’arrivée du 8e épisode (sur PS2), il en est de même en France. Et justement, la 3DS accueille ce mois-ci le portage du septième épisode, jusqu’alors réservé aux possesseurs de PS1 US ou japonaises. Le jeu est enfin accessible en Français, mais cette fois en 3D ! 

La Quête du Dragon

Aaaah, Dragon Quest ! Dans le monde du J-RPG, cette licence vieille de trente ans est aussi populaire que sa rivale, Final Fantasy. Même encore plus au Pays du Soleil levant. Au point qu’au Japon, une loi interdit la sortie d’un nouvel épisode un jour d’école, pour éviter un absentéisme soudain, les jeunes élèves nippons préférant faire la queue devant leur boutique préférée que de suivre les cours de maths !

Oui, « DraQue » (pour les intimes) est une véritable légende ! Un mythe planétaire, reconnaissable entre tous les J-RPG grâce à la patte de trois fidèles de la première heure, toujours sur le pont : le créateur Yuji Horii (également game-designer), le compositeur Kôïchi Sujiyama et le chara-designer Akira Toriyama. Voilà de quoi vous donner des frissons jusqu’à la moelle !

Premièrement, le lancement du jeu est toujours accompagné par ce thème indémodable et qui vous donne un sourire jusqu’au oreilles, la célèbre « Overture » signée par le compositeur de la série, Kôïchi Sujiyama. Comme pour Super Mario Bros, Pokémon ou Zelda, le thème de « DraQue » se reconnaît entre mille, en vous mettant des images plein la tête ! Ecoutez cette piste, et vous allez vite comprendre :

Deuxièmement, le chara-design est l’oeuvre d’un certain Akira Toriyama, le génial géniteur de DragonBall ! Vous l’aurez compris : rien qu’avec ces arguments, chaque épisode de Dragon Quest fleure bon le chef d’oeuvre que l’on gardera précieusement toute sa vie ! (non, je n’exagère pas, j’ai gardé tous les épisodes que j’ai pu posséder).

Et nous allons aujourd’hui parler du septième épisode : Dragon Quest VII : Les Guerriers de l’Eden est sorti en 2000 au Japon et en 2001 aux USA sur PlayStation, ce petit bijou n’était sans doute pas arrivé jusqu’à vous, excepté si comme moi vous aviez de bonnes adresses import ainsi qu’un adaptateur, et donc la possibilité de jouer sur des galettes d’autres zones !

Nintendo a donc décidé de ressusciter le mythe (sans doute l’un des plus intéressants de la saga), de le porter sur 3DS. Le jeu est sorti en février 2013 au Japon… Et enfin, trois ans plus tard, il arrive enfin ce mois de septembre, sur nos 3DS européennes, sous le nom « Dragon Quest VII : La Quête des Vestiges du Monde » ! Ca y est, je kiffe, j’ai le sourire, je lance le test !

Île était une fois…

L’histoire de ce nouveau DraQue débute donc, comme cet intertitre vous le laisse supposer, sur une île, Melyor, dans la baie d’Alevin. Toute petite : un village, un château, une grotte, un temple ancien et un cimetière… Et au delà de ce monde pacifique, il n’y a rien, à part l’océan à perte de vue !

Vous incarnez le fils d’un pêcheur (à vous de donner un nom à votre héros), promis à prendre la suite de papa, donc pas forcément enclin à partir à l’aventure, si ce n’est lorsqu’il est entraîné par son meilleur ami, le prince Kyllian. Cet intrépide (mais pas toujours fûté) rejeton royal est un fervent adepte de la théorie du complot ! Selon le blondinet, « on nous ment ! » Seuls au monde ? Pour lui, c’est du pipeau ! Mais alors, pourquoi cache t-on la vérité ? C’est justement ce qu’il compte découvrir !

Un jour, nos deux héros font le mur et parviennent à pénétrer dans le Sanctuaire des Mystères, réveillant une créature ancestrale (et bizarroïde) qui leur demande de réunir des fragments de tablettes. Une fois cette première mission accomplie, les deux garçons et leur amie d’enfance Maribel se retrouvent téléportés dans un monde inconnu…

Il s’avère que ce monde mystérieux n’est autre que le passé. Et ils vont vite réaliser qu’en sauvant des personnes d’antan, ils influeront sur leur présent, restaurant entre autres des îles disparues ! Le jeu et votre longue quête commencent enfin : vous allez devoir reconstruire le monde de vos mains… (par la suite, un nouveau personnage rejoindra l’aventure).

Le scénario peut vous sembler classique, mais il est habilement amené, et tranche totalement avec cette vieille tradition « dragonquestienne » qui consiste à vous faire incarner un héros amnésique 😉 Et puis, c’est un Dragon Quest, donc vous vous doutez que l’histoire va très vite aborder une nouvelle dramaturgie : plus complexe qu’elle n’y paraît, elle vous réserve quelques surprises, que je n’aborderai pas ici !

Technique : simplicité rime avec efficacité

Dans leur labo, les p’tits gars d’ArtePiazza maîtrisent leur sujet, ont été capables de déchiffrer la séquence ADN qui fait que DraQue est DraQue ! Et tout y est : des couleurs chatoyantes, des personnages charismatiques, des villages fidèles aux standards de la série, sans oublier le bestiaire que tout fan de la saga connaît désormais par coeur ! Dragon Quest est avant tout un univers complexe et cohérent, avec ses codes, sa mythologie, ses habitudes, goûtés et approuvés depuis les origines de la franchise. Et le secret de la réussite passe par un profond respect de cette nomenclature. ArtePiazza et Square-Enix l’ont bien compris, pour notre plus grand bonheur !

Je ne reviendrai pas ici sur les deux aspects déjà évoqués plus haut, à savoir la bande-son de Kôïchi Sujiyama qui, comme dans chaque épisode est magnifique, ou encore le chara-design de Môssieur Akira Toriyama, fidèle à lui-même, donc tout simplement génial ! D’entrée, le jeu séduit tout simplement parce que c’est un Dragon Quest, et rien que pour cela, on sait qu’il sera bon ^^

Après avoir vécu sur PlayStation « première du nom », c’est bel et bien sur 3DS que tourne le jeu aujourd’hui. Par conséquent, vous vous doutez bien que nous allons particulièrement nous intéresser à la 3D, à ce relief que seule la portable de Nintendo est capable de nous offrir. Et là encore, le résultat est très agréable : la 3D est un ajout tout simplement délicieux, à plus forte raison lorsque vous vous déplacez sur la map ! Et ce malgré quelques petits bugs d’affichage que l’on oublie vite.

On regrettera cependant quelques soucis occasionnels avec la caméra, parfois trop proche des héros, l’angle de vue proposé n’étant pas toujours cohérent avec l’action. Cela se ressent surtout lorsque vous franchissez une porte, l’entrée d’un village ou un escalier : il n’est pas rare que, parce que trop proche du groupe (qui disparaît parfois de l’écran), vous vous trompiez et reveniez sur vos pas, bien malgré vous.

La réalisation est une réussite, allant au delà du simple portage : la possibilité d’orienter la vue (excepté dans les donjons) est un plus indéniable, et le jeu se pare d’effets visuels et d’effets de lumière efficaces. Si le titre ne fait pas vraiment dans la débauche d’effets visuels, il se contente d’agrémenter sa narration avec des cadrages ou des gros plans fort sympas : les développeurs composent avec les limites de la 3DS, sans chercher à sortir des sentiers battus outre mesure : la mise en scène est donc soft, sans fioritures, mais ça marche !

On appréciera également le soucis du détail qui confère à ce titre une certaine crédibilité : des mouvements des personnages aux monstres bénéficiant chacun d’une animation propre, en passant par les tenues qui changent désormais en fonction de la classe que vous choisissez… Les développeurs nous démontrent encore une fois que ce n’est pas avec des effets de folie que l’on réalise les meilleurs jeux, et que la simplicité est parfois tout aussi efficace, que la simple suggestion peut être aussi éloquente que des cinématiques hollywoodiennes…

Certes, avec quelques pixels parfois un peu grossiers et des textures épurées, le jeu semble techniquement daté. Mais doit-on rappeler que nous sommes ici sur une 3DS qui donne tout ce qu’elle a, et elle le fait très bien ! Et puis, cette remarque offre ici une parfaite transition vers le point suivant : à l’heure des MMO en temps réel, DraQue est l’un des derniers résistants, défendant un genre qui nous faisait tant rêver autrefois…

Le J-RPG « old-school » n’est pas mort !

Oui, Dragon Quest VII est un jeu « old-school » !! Ce qui, dans ce contexte précis, est très loin d’être un défaut ! Je dirais même que c’est avec une certaine émotion que je replonge dans un genre que j’avais délaissé, faute de temps ! Comme le héros du jeu, me voilà replongé dans le passé, à une époque insouciante où je pouvais consacrer des heures à Final Fantasy VII, aux autres Dragon Quest, à Phantasy Star, à Secret of Mana ou encore à Chrono Trigger (qui réunissait une grosse partie de l’équipe de génie de Dragon Quest)…

DraQue 7 est « old-school »  dans le choix de nous proposer des combats au tour par tour ! Les puristes crieront « ô joie » tandis que les néo-rpgistes hurleront au scandale. Toujours est-il que le tour par tour est, de fait, le système qui se rapproche le plus des jeux de plateau, parents du RPG sur consoles. Ici, de manière assez conventionnelle, vous devrez choisir entre attaquer, utiliser de la magie, vos aptitudes, utiliser des objets, vous défendre ou fuir le combat. Vos héros attaquent à tour de rôle, puis les monstres répliquent, et ainsi de suite…

Un système qui, de plus, vous permet de faire chauffer vos cellules grises, de vous lancer en ayant mûrement préparé votre stratégie pour la phase qui va suivre (attaquer lorsqu’il vous reste dix points de vie, c’est un peu casse-gueule). D’autant que les monstres peuvent parfois adopter des stratégies particulières pour vous surprendre : ils peuvent fuir, appeler des potes en renfort, ou s’associer à des monstres ailés pour vous attaquer différemment.

En outre, les ennemis apparaissent désormais sur la map, ce qui vous laisse le choix : les attaquer pour vous faire de l’XP, ou les contourner si votre jauge de santé est au plus mal (bien que, s’ils vous aperçoivent, ils ont tendance à vous courser !).

Dragon Quest VII est aussi d’une autre génération dans sa narration : il nous emmène dans un schéma scénaristique qui était monnaie courante dans les années 90, mais qui s’est quelque peu perdu ces derniers temps, les héros de RPG modernes ayant tendance à se complaire dans des univers steampunk ou futuristes. Dragon Quest ne propose pas de vivre une aventure, mais de suivre une épopée, celle d’un jeune garçon tout à fait banal qui, suite à des événements qu’il ne contrôle pas, va devenir le seul capable de sauver son village, mais surtout le monde, d’un mal que nul ne peut enrayer. L’accomplissement de son objectif repose désormais sur ses capacités à se surpasser… Je vous avais prévenus : il y a vingt ans, ce schéma était celui de tous les J-RPG. Aujourd’hui, cela fait plaisir de retrouver cette bonne vieille métaphore du « rite de passage », de l’enfance à l’âge adulte !

Dans cet épisode, vous retrouverez également de nombreux standards, parfois inventés mais souvent démocratisés par Dragon Quest, que tous les J-RPG ont repris par la suite : des coffres à débusquer dans les donjons, des jarres à péter dans les maisons pour y trouver de l’argent ou des herbes médicinales, des PNJ qui tournent en boucle lorsque vous leur parlez, des classes (ou jobs) à apprendre à vos héros, des magies et capacités à apprendre au fur et à mesure que vous augmentez votre niveau.

D’ailleurs, puisque j’évoquais cet aspect dans le paragraphe ci-dessus, j’aimerais m’attarder sur la mécanique plutôt bien amenée des « jobs », qui sont appelés ici « vocations » ! Comme dans beaucoup de J-RPG, cette option vous permettra d’affecter à chaque personnage un rôle, un métier, une vocation, qui lui conférera de nouveaux pouvoirs, lui enseignera de nouvelles aptitudes : vos héros pourront par exemple devenir berger, mage, guerrier, prêtre, danseur, ou encore pirate (30 vocations au total). A vous de trouver le bon équilibre pour constituer une équipe efficace. De même, vous pourrez « sympathiser » avec certains monstres du jeu (une vingtaine), qui pourront ensuite venir vous apprendre leurs propres aptitudes…

La couleur « old-school » de Dragon Quest VII est sans doute ce qui fait sa force, mais c’est aussi la marque de fabrique de la série : quand les J-RPG évoluent avec leur temps en reproduisant de ce qui se fait chez le voisin, Dragon Quest ne s’inspire que de lui-même, en apportant une touche de mieux à chaque fois, et sans oublier d’insuffler une part de modernité !

Le jeu des différences

Vous l’aurez compris, les développeurs ne pouvaient pas se contenter de nous offrir un simple « copier-coller » du jeu original, qui aurait alors bien mal accusé le poids de tant d’années. Alors, c’est avec pas mal de corrections que se présente à vous cette nouvelle mouture.

A commencer par un rythme qui a été ici accéléré (montée en niveau de vos héros, début du jeu qui s’éternisait dans le jeu original, plus rythmé ici, etc). Par ailleurs, les développeurs ont eu la bonne idée de corriger quelques bugs qui pouvaient vous bloquer de manière définitive dans le jeu des années 2000. On apprécie !

La nouveauté la plus appréciable est l’ajout d’un radar qui vous aidera à localiser plus facilement les fragments bleu, jaune, rouge ou vert vous permettant de faire apparaître la vingtaine d’îles à débloquer. Une nouvelle option qui contribue à vous faciliter la vie. Mais ne pensez pas que le jeu sera plus court pour autant. Car si je ne suis hélas pas encore parvenu à la fin du soft, mon aventure tourne aujourd’hui autour des 70 heures de jeu, me promettant un finish estimé autour de la centaine d’heures. Donc proche de la durée de vie originale, sans parler des quêtes annexes !

Car une autre grosse nouveauté de cet opus, c’est bien évidemment la dimension sociale. Via Streetpass, le jeu vous permet d’échanger des « tablettes de voyageur » avec d’autres joueurs, afin de débloquer de nouveaux donjons, plus retors. Et chaque semaine, le « bar de téléchargement » vous offre des tablettes spéciales. Voilà de quoi rallonger l’expérience, si vous aviez déjà terminé les quêtes annexes, passé trop de temps au Casino, ou peuplé votre ville de « monstres gentils ».

Mais tout n’est pas non plus complètement rose, et d’autres modifications auraient été les bienvenues. Je pense par exemple au coté redondant provoqué par des villages qui se ressemblent beaucoup dans leur construction (une église pour sauvegarder, une auberge pour dormir, une boutique pour faire du shopping et des maisons à piller), eux-mêmes habités par des villageois qui sont les mêmes d’une île à l’autre (peu de modèles mais beaucoup de clones). Un peu de variété dans les modèles aurait été la bienvenue, même si cet aspect cosmétique ne nuit pas au plaisir de jouer.

Les non-habitués du genre seront surtout agacés par le rythme relativement lent du titre, et l’obligation de faire des allers et retours incessants d’un point à l’autre de la map pour accomplir des quêtes. Et ce n’est pas l’apparition de moyens de locomotion comme le bateau qui vous rendront la tâche plus simple ! Au début, on s’incline, mais très vite, cet aspect peut devenir redondant voire lassant, même si mon expérience du RPG me dicte qu’il y a eu pire par le passé (jeux dans lesquels le perso ne peut pas courir, ou dont les maps sont dix fois plus grandes…).

Au final

Jouer à Dragon Quest n’est ni un passe-temps, ni une simple virée dans l’univers du J-RPG ! Jouer à Dragon Quest est presque une religion ! Avec une ambiance et un univers qui lui sont propres, mais une histoire totalement inédite, ce nouvel épisode ne déroge pas à une règle vieille de trente ans, et qui a donné ses lettres de noblesses à la licence, pour ne pas dire au genre !

Alors « oui », on pourra toujours reprocher à DraQue 7 une technique qui montre parfois ses limites (ou plutôt celles de son support), un rythme lent ou encore d’incessants va-et-viens d’un bout à l’autre de la map. Il n’empêche que ce nouvel épisode est, d’un avis purement personnel, une franche réussite, qui nous plonge dans cette mythologie qui nous a tant fait rêver par le passé. Digne héritier d’un genre qui a bien évolué, Dragon Quest VII : La Quête des Vestiges du Monde ne peut pas être renié par ses pairs, et constitue un digne et légitime représentant de la lignée.

Nintendo met aujourd’hui fin à bientôt vingt ans de frustration, en offrant une nouvelle vie (et quelle vie !) à un épisode de Dragon Quest que les joueurs européens n’auront, pour la plupart, vu que dans les magazines spécialisés de l’époque ! Aujourd’hui, ils peuvent enfin toucher l’objet, y jouer dans une version traduite en Français, en 3D, corrigée et améliorée ! Incontournable !


Verdict

draque7

Un gros « OUI » !! Le portage est réussi, et nous offre un voyage aussi dépaysant qu’épique ! Un must-have !

17/20

Les + :

  • Une durée de vie colossale (une centaine d’heures en ligne droite), que je n’avais pas vu depuis Final Fantasy VII ou Skyrim !
  • Une trentaine de classes + des monstres à « apprivoiser »
  • La musique culte de Kôïchi Sujiyama
  • Le chara-design d’Akira Toriyama tout simplement génial
  • Tout le bestiaire de la série est là
  • La rotation de caméra
  • La 3D est propre
  • Le radar vous file une aide précieuse
  • Une vingtaine d’îles à débloquer
  • Des « plus » appréciables, par rapport à la version originale
  • Le streetpass pour débloquer des donjons supplémentaires et des objets

Les – :

  • Les allers et retours sur la map, vite fatiguants
  • Menus pas toujours ergonomiques
  • La caméra parfois trop proche des héros
  • Un rythme peut-être un poil trop lent pour ceux qui ne connaissent pas les RPG à l’ancienne
  • Mais pourquoi n’a t-on pas le droit à la musique en version symphonique, comme au Japon ?
  • Adieu, vie sociale ! 😉

Dragon Quest VII : La Quête des Vestiges du Monde, par ArtePiazza et Square-Enix, pour Nintendo, sur 3DS. Pegi : 12. Prix : 39,99€.

Testé sur une version commerciale fournie par l’éditeur.

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